Robert Knox captif du roi de Kandy 1659‑1680 : regard puritain sur un nouveau monde, Ceylan au XVIIe siècle

Robert Knox, captive of the King of Kandy 1659‑1680: A Puritan View of a New World, Ceylon in the XVIIth Century

Jacques Tual

p. 99-110

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Jacques Tual, « Robert Knox captif du roi de Kandy 1659‑1680 : regard puritain sur un nouveau monde, Ceylan au XVIIe siècle », Carnets de recherches de l'océan Indien, 2 | -1, 99-110.

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Jacques Tual, « Robert Knox captif du roi de Kandy 1659‑1680 : regard puritain sur un nouveau monde, Ceylan au XVIIe siècle », Carnets de recherches de l'océan Indien [En ligne], 2 | 2018, mis en ligne le 25 février 2023, consulté le 30 octobre 2024. URL : https://carnets-oi.univ-reunion.fr/276

Dans une approche relevant du champ d’étude de la Civilisation Britannique, notre réflexion ambitionne d’aborder le récit de Robert Knox, marin anglais, qui échoua au large des côtes sri lankaises, prisonnier du roi de Kandy à Ceylan à la fin du XVIIe siècle. Si la mer était son milieu de prédilection, Knox s’en éloignera durant ses 20 années d’incarcération à Ceylan entre 1659 et 1680, captif du roi de Kandy Raja Singha, mais y retournera lorsqu’il réussit à s’échapper, grâce aux Hollandais qui l’emmenèrent en Batavia. Cette proposition souhaite exposer un récit exceptionnel provenant d’un marin devenu terrien, la première représentation anglo-saxonne d’une population insulaire de l’océan Indien, les Cinghalais. Comment Knox traduisit-il les souvenirs d’un vécu parmi les populations de l’île de Ceylan, peu orientés d’ailleurs vers la mer ? En effet, Knox a dû échanger ses traversées maritimes contre une vie sédentaire, parmi un peuple d’agriculteurs. Quelle description de la société cinghalaise ? Que peut-on tirer de cette représentation anglaise d’un peuple insulaire, enclavé ? Entre réalités et imaginaires, à la fois récit de voyages et étude anthropologique, l’œuvre de Knox présente, dans le détail, un monde exotique, en passe d’être conquis par les pouvoirs coloniaux européens…

Within the wider framework of British Cultural Studies, this paper seeks to investigate the extraordinary story of Robert Knox (1640-1720), an Englishman held prisoner by Rajasingha II, King of Kandy, in Ceylon (Sri Lanka) after a shipwreck in November 1659. Knox’s father as well as 14 members of the crew were arrested by the king’s troops. If the ocean was his ground of predilection, Knox’s strange destiny will alienate him from what was his natural environment, the sea, during his captivity in the central highlands of Ceylon, between 1659 and 1680. Knox will return to the sea once he manages to escape from the grips of the Kandyan monarch, with the help of the Dutch who escort him to Batavia. Meanwhile, exchanging maritime expeditions for a sedentary and solitary life, how does our sailor-turned-farmer translate the memories of his two decades of lived experience amongst the poverty-stricken peasantry of an enclaved upcountry kingdom? What is the improbable story of a man who went from freedom to incarceration and, on his return to England, presented the first Anglo-Saxon representation of an Indian Ocean population, the Sinhalese? Between realities and the imaginary, both a travel narrative and an anthropological study, Knox’s work presents, in encyclopaedic detail, an exotic world, in the process of being conquered by European colonial powers…

DOI : 10.26171/carnets-oi_0206

Introduction

Ceylan, siège d’une culture bouddhiste deux fois millénaire, est un monde totalement neuf pour les Anglais dont la découverte de l’île et sa colonisation au siècle suivant s’appuie en grande partie sur la Relation Historique de l’Ile de Ceylan de Robert Knox1. Le regard intime, presque anthropologique, de ce puritain anglais sur un monde inconnu étonne l’Angleterre du XVIIe siècle. En effet, en révélant au lecteur anglais qu’une société complexe, dont les mœurs peuvent être comprises d’un chrétien honnête, se trouve à portée de l’Inde où les Anglais déjà présents, s’enrichissent depuis le début du siècle, Knox incite ses compatriotes à rêver d’un Orient mystérieux et curieusement proche. Ceylan est un monde nouveau mais dont les habitants, nous dit l’auteur, « ressemblent le plus à nous autres, Européens »2.

Publiée en 1681, la Relation Historique de l’Ile de Ceylan décrit la captivité de l’auteur dix-neuf années durant à Ceylan et obtient un succès considérable en Angleterre3. L’Académie Royale anglaise en collaboration avec la Compagnie des Indes Orientales soutiennent vivement la parution du livre pour des raisons scientifiques en même temps qu’économiques, et pourrait-on dire, de géostratégie marchande4.

Mais le succès remporté par la relation de Knox tient aussi à d’autres facteurs, tout d’abord, l’attrait pour les récits de voyage et d’aventure maritime au XVIIe. Les Anglais ignorent alors tout de Ceylan, ce pays étant entré dès le début du XVIe dans l’ère d’influence du Portugal et de sa possession indienne de Goa (1510). Knox est capturé en 1659, au moment où le roi du royaume de Kandy, Rajasingha II (1629-1687) a réussi à se débarrasser de la mainmise portugaise sur les côtes de l’île en appelant à son aide les Hollandais. Mal lui en a pris et le royaume de Kandy doit désormais faire face aux desseins de conquête des Hollandais par une guerre d’attrition qui durera toute la deuxième moitié du XVIIe.

Or, à cette époque, les Anglais sont devenus les grands rivaux maritimes et commerciaux de la Hollande, ce qui explique pourquoi Rajasingha II, soupçonneux et paranoïaque, souhaite en capturer pour les interroger. Le royaume de Kandy est lui-même dans une situation particulière. Monde inconnu puisqu’enclavé dans le haut pays de l’île, malgré des accès sporadiques aux côtes, il est le dernier territoire indépendant gouverné par une dynastie cinghalaise bouddhiste durant toute l’occupation portugaise, puis hollandaise, jusqu’à la conquête de ce dernier bastion par les Anglais en 1815.

Surtout, le récit de Knox fonde pour plusieurs siècles la vision qu’auront les Anglais d’une société ceylanaise, fort différente de l’indienne parce que bouddhiste. À tel point que cette vision précoloniale de Ceylan et les clichés qui en furent tirés vont être récupérés par les autorités britanniques, puis par les Sri Lankais eux-mêmes au 20e siècle, afin d’accorder à la majorité cingalaise bouddhiste du pays un statut exalté et privilégié par rapport aux autres habitants de l’île5.

Plus significativement, la Relation Historique constitue encore aujourd’hui un texte de référence pour les historiens sri lankais6, une sorte d’instantané lacunaire et imparfait d’une société cinghalaise traditionnelle, résistant de toutes ses forces à la colonisation des puissances européennes. Ajoutons que la popularité actuelle de ce récit au Sri Lanka tient au respect qu’il manifeste pour le peuple cinghalais.

Captif et devenu colon malgré lui parce qu’il faut bien assurer sa survie pendant sa captivité, Knox met en pratique, comme le fera Robinson Crusoë, l’éthique protestante du travail, beaucoup d’indices indiquant que Daniel Defoe s’est largement inspiré de Knox. Tour à tour, agriculteur, fabricant de bonnets de coton, prêteur de riz à 50 % d’intérêts l’an, marchand ambulant, la vision que retire Knox de la société ceylanaise provient de son intimité avec le monde rural. Maîtrisant assez vite la langue cinghalaise, mais la déchiffrant mal, ne l’écrivant apparemment pas, comme la plupart des paysans qu’il côtoie, notre auteur est l’exemple rarissime d’un Européen intégré à une société asiatique non encore colonisée. Nous sommes loin ici des descriptions que peuvent donner de Ceylan les quelques malheureux ambassadeurs, Anglais, Hollandais ou Français, captifs, eux aussi, à la cour du roi de Kandy.

Ajoutons que la Relation Historique n’annonce en rien les théories naturalistes des XVIIe et XVIIIe siècles7 et surtout pas le racialisme à venir du XIXe siècle qui fonde l’idéologie coloniale8. Bien au contraire, le texte de Knox, parsemé de références bibliques, sous-entend qu’on pourrait vivre heureux à Ceylan parmi les Cinghalais n’était-ce qu’on y fut captif et que le souverain y est un tyran. Et lorsqu’il parle de couleur de peau (whites, blacks), c’est à la manière des Cinghalais eux-mêmes, plus préoccupés de distinctions de castes que de couleur de peau.

Le scénario de la capture en 1659 de Knox et de 17 autres marins, outre un serviteur malabar (Tamoul) embarqués sur le navire Anne dont son père est capitaine, a pour origine l’ignorance où sont les Anglais de la situation dans l’île. Ayant essuyé une tempête au large de la côte de Coromandel, après avoir démâté, la frégate Anne, armée par la East India Company est obligée de réparer en accostant à Trincomalee (Kottyar) sur la côte est. Après trois ou quatre mois d’escale, le roi de Kandy, averti de l’arrivée des Anglais, envoie une escouade pour s’emparer d’eux et si possible de leur navire, sans succès toutefois.

Mais les Cinghalais ont réussi à retenir captif le capitaine, Robert Knox, son fils – notre auteur porte le même homonyme – et les autres marins, attirés à terre sous divers prétextes. Comme le constate Knox, « notre plus grande bévue avait été de ne point envoyer au roi un message lui demandant la permission d’accoster dans son royaume »9.

Emmenés sans brutalité mais sous escorte armée vers l’intérieur de l’île, l’année 1660 est le début d’une captivité de dix-neuf années et demi pour notre auteur ; le capitaine, son père, ne survivant qu’un an seulement à sa capture et au paludisme (1661).

Les prisonniers sont très vite assignés à résidence dans des villages séparés les uns des autres et répartis, selon les nécessités et les caprices du roi, à des endroits différents au fil du temps, ce qui permettra à notre auteur d’observer la plus grande partie du royaume kandyen. D’une certaine manière, Rajasingha II se constitue une sorte de ménagerie humaine10 de prisonniers européens (anglais, portugais, hollandais, français) dont très peu, – quatre ou cinq seulement – réussissent à s’échapper avant la fin de son règne.

Avant que d’entrer dans le détail du texte, il convient de dire un mot sur l’anthropologue malgré lui qu’est devenu le jeune Robert Knox. Lors de sa capture à dix-neuf ans, il est le pur produit du radicalisme protestant qui a soutenu la révolution puritaine, et dont sa famille partage les idéaux11. Après quelques années d’école primaire, Knox embrasse, à quatorze ans, une carrière de marin et effectue un premier voyage en Inde. Il reconnaît que toute son éducation, l’apprentissage de la lecture et de l’écriture, il la doit à sa mère, pieuse femme qui le forme comme il se doit, à l’école de la Bible12. Aussi demeure-t-il, tout au long de son séjour à Ceylan, un chrétien fervent, mais peu encombré de doctrines, ses préjugés étant entièrement dirigés contre l’idolâtrie païenne, dont le bouddhisme et l’hindouisme lui offrent l’image.

En vérité, c’est la vie au sein d’une riche nature tropicale et le travail de la terre, accompagné de lectures bibliques ainsi que la fréquentation d’une paysannerie tolérante et hospitalière envers l’étranger, somme toute proche de sa condition, où seuls dominent le souci de la survie et la fatalité, qui offrent une consolation à sa captivité.

Le regard qu’il porte sur la société cinghalaise est donc attentif pour plusieurs raisons : la curiosité à l’égard d’hommes qui, pour lui ressemblent étrangement à des Européens13, mais aussi parce qu’il n’a jamais abandonné l’idée de s’enfuir et qu’il lui faut comprendre parfaitement les mœurs et les mentalités cinghalaises pour mener à bien son projet. On le conçoit, son regard, s’il ne peut être objectif, s’efforce de comprendre en profondeur la société où il s’est retrouvé en quelque sorte, naufragé.

Le texte de la Relation Historique est divisé en quatre parties. La première, portant sur la géographie, la flore et la faune de l’île, répond aux interrogations exprimées par ses commanditaires de l’Académie Royale et de la East India Company, l’un de leurs soucis étant d’apprendre comment les Hollandais contrôlent le commerce lucratif de la cannelle. Nous nous y attarderons peu, bien que Knox ait décrit, pour la première fois, certaines plantes et animaux inconnus en Europe : le palmier tallipot, l’arbre sacré du Bo-tree, le chanvre indien (cannabis), les iguanes varans, une variété de buffle sauvage, le gauvera, disparue à l’arrivée des Anglais au XIXe. L’éléphant ceylanais, animal emblématique, occupe ici un large chapitre, en particulier, l’usage original que fait le roi de Kandy de cette bête, lui livrant les condamnés à mort afin qu’elle les piétine et les démembre vivants.

En outre, la description minutieuse de la riziculture à Ceylan, ses techniques agricoles et les diverses variétés de riz, est un témoignage de première main puisque l’auteur s’est retrouvé lui-même riziculteur plusieurs années durant. Appliquant l’éthique de la quotidienneté puritaine, Knox, à force de privations, et surtout d’économies, devient, vers la dixième année de sa captivité, un propriétaire terrien, éleveur de porcs, riziculteur et arboriculteur prospère ; envié, à ce titre, par ses voisins cinghalais, qui peinent à comprendre son succès.

Ainsi s’il est à l’origine du fameux cliché selon lequel les Cinghalais « sont naturellement indolents et paresseux », cliché repris par tous les auteurs britanniques coloniaux, c’est, nous dit-il, dans la mesure où les « Cinghalais, opprimés qu’ils sont par un tyran, ne se soucient guère de planter pour obtenir un surplus, immédiatement confisqué par le roi »14. On le voit, s’il dénonce un vice dans les mœurs cinghalaises, Knox s’efforce d’expliquer ce comportement par la nécessité plus que par le hasard15.

Plus essentielles pour dégager sa vision de l’altérité cinghalaise sont les trois parties suivantes du texte. Nous les aborderons ici en insistant sur deux aspects qui décontenancent le plus Knox parmi les mœurs cinghalaises : la sexualité, et bien sûr, la religion, phantasmes habituels des récits européens de « premières rencontres ».

L’altérité cinghalaise

Soulignons d’abord que la relation de Knox est toute entière consacrée au peuple cinghalais, l’existence de populations tamoules, celle d’un royaume tamoul nordiste de Jaffnapatnam, inféodé aux Hollandais, la présence de minorités musulmanes, de cafres chrétiens luso/hollandais, n’étant évoquée qu’en passant. En revanche, notre auteur semble tout ignorer du mythe des origines du peuple cinghalais, de son ascendance indo-aryenne (en provenance du Bengale ou du nord de l’Inde) de son arrivée dans l’île au sixième siècle avant notre ère, ou de celle du Bouddhisme trois siècles plus tard, faisant de Ceylan sa terre d’élection.

Au passage Knox nous offre la première description faite par un Européen d’une population aborigène qu’il décrit comme « les cinghalais primitifs vivant côte à côte des Cinghalais « civilisés », et notre auteur de consacrer plusieurs pages à ceux qu’on appelle les Veddahs16, les mêmes que l’Abbé Raynal plus tard, dans son Histoire des Deux Indes nomme les « Bedas ». Vivant à l’écart, dans la brousse ou les forêts, ces chasseurs-cueilleurs entretiennent une relation curieuse avec la monarchie cinghalaise, faite de crainte et de respect réciproques qui surprend Knox. C’est que leur présence, antérieure à l’arrivée des Cinghalais, et leur alliance avec les dynasties indo–aryennes de l’île font précisément partie des mythes fondateurs du peuple cinghalais inscrits dans la chronique du Mahavamsa17.

Revenant aux « civilisés cinghalais », – la majorité des habitants – notre auteur les décrit ainsi : « c’est un peuple aux belles manières et à la physionomie agréable, beaucoup plus qu’aucun autre peuple que j’ai eu l’occasion de voir en Inde ». Agiles et dynamiques, Knox remarque qu’ils dorment peu, sont très résistants, très fiers, peu colériques ou violents18 : « Il est très rare qu’ils frappent leurs esclaves avec lesquels ils s’entretiennent très familièrement », du reste, certains esclaves sont d’extraction noble, réduits en servitude pour dettes. Enfin, les Cinghalais sont très sobres et économes, vertus capitales pour ce dévot protestant19.

En revanche, sans doute en raison de sa propre sujétion aux caprices du roi kandyen, « la traitrise et la ruse » dominent largement le comportement des Cinghalais Kandyens. Le mensonge pour notre auteur y est érigé en stratégie du quotidien. Pour ce peuple « aucun sentiment de honte ni de gêne » ne se manifeste, même s’ils sont découverts, ce qui peut facilement induire l’étranger en erreur. En effet, ajoute notre captif, leur conversation, extrêmement courtoise, et leurs belles manières, leurs protestations constantes d’amitié ne sont qu’un leurre20.

Le roi de Kandy lui-même maîtrise à la perfection la fourberie, à en croire les nombreux exemples que nous en donne l’auteur21. Le plus comique est son traitement de l’ambassadeur français, trop arrogant pour réussir sa mission. Première erreur, contre l’avis de tous, celui-ci insiste pour arriver à cheval aux portes du palais du roi, et repart en ville sans attendre l’audience que lui a accordé Rajasingha, sous prétexte qu’elle tardait. Sur le moment, point de réaction du souverain. Mais mal en a pris à l’envoyé du roi de France dès le lendemain matin des gardes défoncent la porte de sa chambre et l’enchaînent au mur, le maintenant six semaines durant dans cette position inconfortable22.

La duplicité du souverain est illustrée de façon récurrente dans le texte, elle s’applique aux Cinghalais comme aux étrangers. Notre auteur relate combien la faveur royale est dangereuse, puisqu’à Kandy la roche tarpéienne est proche du capitole. Nombre de jeunes nobles appelés à la cour périssent dans des conditions atroces sous les prétextes les plus futiles, empalés, ou piétinés à mort par les éléphants royaux.

Ainsi en est-il d’un jeune mousse anglais ayant accepté de servir à la cour, (Henry Man), pour avoir tardé à remettre une lettre destinée au roi, celui-ci est condamné à périr déchiqueté par les éléphants. Rajasingha, dans son cynisme ou son inconscience, s’empressera à la suite de cette exécution de rassurer le reste des captifs anglais qu’il pense chagrinés par la nouvelle de cette mort atroce23. Knox prendra donc le plus grand soin de se faire oublier du terrible geôlier comprenant qu’une fois entré au palais royal tout espoir d’évasion serait réduit à néant.

Au passage, on peut se demander si cette culture de la dissimulation n’aurait à son tour déteint sur notre auteur, lequel réussit pendant dix-neuf ans et demi à cacher ses réelles intentions d’évasion à tous ses voisins cinghalais, y compris à la plupart de ses compagnons d’infortune, les autres captifs anglais.

Ce qui frappe notre auteur de prime abord est l’importance de la structure de la société cinghalaise en castes. Elles sont fort nombreuses, nous dit Knox, qui consacre un chapitre entier « aux rangs et qualités » des Cinghalais, repérant au moins quatorze catégories différentes. L’importance du système castéïque, atténué d’une certaine manière par le Bouddhisme est donc fondamentale d’autant qu’elle conditionne l’élasticité des mœurs. Ainsi de l’insistance mise par les Cinghalais à ne point déroger en prenant pour partenaires sexuels ou matrimoniaux des membres de castes inférieures. Avec, malgré tout, une exception pour les hommes qui peuvent prendre une concubine de rang inférieur, pourvu qu’ils ne mangent ni ne boivent en sa compagnie, ou qu’ils ne souhaitent en faire une épouse légitime.

La caste à laquelle il consacre le plus de pages est celle de la noblesse terrienne kandyenne, les radalas qu’il nomme Hondrews dans son texte24. Notre auteur semble satisfait de constater que la noblesse au royaume de Kandy n’est pas fonction du degré de fortune mais de la naissance ce qui évoque la structure qui présidait dans l’Europe du XVIIe siècle. Il estime, du reste, que la majeure partie des habitants du royaume appartient à cette noblesse terrienne, bien que celle-ci soit de deux degrés.

Une source supplémentaire de satisfaction pour notre captif est le fait que les « Chrétiens, noirs ou blancs, sont considérés de rang égal à la noblesse locale », ce qui choque les Cinghalais, en revanche, est qu’ils mangent du bœuf et ne se lavent point après leurs besoins naturels, « ce qu’ils considèrent comme une abomination »25.

Dans la mesure où « l’habit fait le moine », Knox s’efforce de repérer les distinctions vestimentaires qui signalent la caste. Tous vont pieds nus, seul le roi est chaussé, mais le port d’un gilet, le couvre-chef en forme de mitre, la longueur du vêtement indiquent l’appartenance à une haute caste, de même que le fait de s’asseoir sur un tabouret au lieu d’à même le sol. Pour la plupart des autres catégories, le torse nu pour hommes et femmes indique l’appartenance aux castes inférieures.

Pour ce qui est de Rajasingha lui-même, Knox qui n’aime guère son geôlier, ne peut résister à s’en moquer en indiquant – comme en témoigne la gravure le représentant – que ce dernier s’est inventé un costume saugrenu, inconnu de la tradition cinghalaise :

[…] il est coiffé d’un bonnet à trois niveaux et quadricorne comme une barrette de jésuite, ornementé d’un plumet, comme en porte un cheval de tête d’attelage, un long ruban arrière en tombe à la mode portugaise, son pourpoint est tellement bizarre que j’ai du mal à le décrire […] et il porte des braies jusqu’aux chevilles26.

En somme, tout indique que Rajasingha s’est confectionné un accoutrement ridicule d’après les modes portugaise et hollandaise.

Au demeurant, bien que « naufragé » au sein d’une culture étrangère, rien n’étonne notre marin. Au royaume de Kandy, les vices qu’il décèle et stigmatise chez les Cinghalais sont peu ou prou les mêmes qu’on retrouve en Angleterre au XVIIe siècle, sauf qu’ici ils confinent à la caricature. Ainsi la corruption généralisée des mœurs, de la justice, la vanité de la noblesse, la tyrannie exercée par le roi contre son peuple ont des accents familiers pour des puritains anglais qui s’étaient soulevés contre l’« Homme de Sang », Charles Ier Stuart. L’avarice, la cupidité de Rajasingha accablant d’impôts son peuple, au point que ce dernier n’a plus goût à travailler, rapportées par Knox à longueur de pages, sont donc des références parlantes pour le lecteur anglais contemporain de Knox.

Ce qui plaît infiniment à notre auteur, preuve qu’il s’y est totalement intégré, est en revanche le mode de vie cinghalais. Leur sobriété alimentaire, mais aussi la qualité de leur cuisine, leur propreté extrême, leur parcimonie, leur industrie parfois, font son admiration : peu d’alcool (de l’arrack extrait de la noix de coco), peu de viande (jamais de bœuf), peu de luxe, de meubles ou de confort ancillaire, même chez les riches, qualifient d’emblée les Cinghalais pour se convertir au Protestantisme si on les y poussait27.

Toutefois, on peut penser que la présence de plus de cinq cents captifs dans le royaume a contribué à affaiblir les interdits sociaux ou alimentaires. Outre les mariages mixtes, l’interdiction bouddhiste concernant les stupéfiants, la viande de bœuf et l’alcool a été battue en brèche. En effet, plusieurs prisonniers européens trouvent une source de revenus dès leur arrivée dans la distillation de l’arrack et sa revente, des captifs portugais et français s’empressant d’ouvrir des tavernes dans la ville sainte de Kandy28.

Peu porté à l’hédonisme, on s’en doute, le séjour à Ceylan est malgré tout l’occasion pour Knox de découvrir et consommer du cannabis : le banga ou chanvre indien. Il en emporte une sorte de confiture (chanvre et juggery) lors de son évasion, qu’il mange à intervalles comme antidote à la dysenterie. Plus tard, fêté à Londres et fréquentant les coffee-houses à la mode avec son ami de l’Académie Royale, Robert Hooke, il lui en amène une provision qu’ils fumeront ensemble, sans doute le premier exemple de consommation publique de cannabis en Europe.

Il n’y a point à Kandy de culture des apparences chez les hommes, hormis les marques vestimentaires les plus simples, seuls le nombre de domestiques qui les accompagnent indiquant le rang ou la caste. Pour les femmes cinghalaises que Knox, célibataire endurci, tiendra à distance tout au long de son séjour, il reconnaît qu’elles ont de beaux visages (well-featured women). Sobres comme les hommes, on reconnaît les femmes de qualité à quelques détails vestimentaires, à des bijoux et aux lobes distendus à dessein de leurs oreilles. Seule différence avec les canons de la beauté européenne, femmes et hommes préfèrent les dents noires aux dents blanches, obtenues par une mastication assidue de bétel, pratique appréciée par Knox29.

Du reste, tout lui convient dans la répartition des rôles entre les sexes, l’homme cinghalais ne s’occupe jamais de tâches domestiques, ce qui serait déchoir, et il dort sur un lit, sa femme et les enfants par terre.

À cet égard, il faut relever la misogynie récurrente de Knox à l’égard du sexe féminin qui s’explique non pas uniquement par une pruderie affective (attachement à sa mère ?) mais par des considérations tactiques. En effet, il sera l’un des rares parmi les (vingt-neuf) prisonniers anglais présents à Ceylan en 1664, hormis l’autre célibataire Stephen Rutland, son compagnon de fuite, à refuser de prendre une Cinghalaise pour femme ou concubine au cours de sa captivité. Pourtant, les femmes cinghalaises, de l’aveu de Knox, sont belles, et bien faites, et ce n’est pas faute d’y avoir été incité par ses voisins cinghalais, lui expliquant que si jamais le roi le relâchait un jour, il pourrait derechef abandonner femme et enfants. À quoi notre puritain de rétorquer « qu’il n’était encore ni assez riche, ni assez amoureux pour ce faire »30. En fait, notre auteur confesse posséder une détestation du mariage, perçu comme une entrave à sa liberté, et à son dessein obsédant de fuir le pays. Au demeurant, il se peut que nous ayons chez Knox l’exemple, rare, d’un de ces « eunuques pour Dieu » loués par l’évangéliste Matthieu31.

Cet idéal de chasteté est conforté par l’observation que fait Knox de la sexualité cinghalaise. C’est que les femmes sont extraordinairement libres au royaume de Kandy, liberté qui verse dans la licence. En effet, nous dit-il, la promiscuité est la règle au sein des familles, pourvu qu’elles appartiennent à la même caste, jeunes gens et jeunes filles se fréquentent d’une maison à l’autre, et partagent souvent les mêmes lits, suscitant sa vive réprobation. En termes voilés, Knox laisse entendre que les Cinghalais pratiquent de manière très adroite la contraception, voire l’avortement. Le contrôle des naissances, comme l’infanticide, sont, chez eux, pratiques courantes32.

Ainsi affirme-t-il, la jeunesse est éduquée à la putasserie (whoredom), ce qui résout du coup une énigme : l’absence de prostitution officielle dans le royaume, rendue effectivement inutile.

Bien que je les perçoive toutes comme des catins, assène-t-il, aucune d’entre elles n’accepterait d’être considérée comme telle ou appelée vesou terme désignant cette profession en cinghalais33.

Et Knox de nous rapporter les exemples des débordements sensuels d’épouses cinghalaises. La seule limite à la concupiscence généralisée semble être la barrière infranchissable de la caste.

Quant aux maris, ils sont pour le moins complaisants. Être cocu à Kandy est la chose la plus courante qui soit. Bien plus, lorsqu’un important personnage réside à son domicile, il arrive que le mari offre sa femme ou sa fille pour la nuit, ce qui n’ôte en rien la considération qu’il leur porte.

Ce qui amène notre auteur à voir dans le mariage kandyen plus une formalité qu’un contrat indissoluble. En effet, ce qui compte dans les unions, c’est l’attirance physique et surtout la caste du partenaire ; le contrat matrimonial n’a que peu de force dans la mesure où le divorce est fréquent, souvent par consentement mutuel, la séparation entraînant la restitution de la dot. Il est courant qu’un homme ou une femme se marient quatre ou cinq fois de suite ; à chaque divorce, les enfants mâles restant aux pères, les filles aux mères.

Et Knox de mentionner une coutume qui horrifia les Britanniques lorsqu’ils occupèrent Ceylan, celle de la polyandrie kandyenne qu’ils s’empressèrent de supprimer en 1859. « Dans ce pays, alors que tout homme, même le plus puissant n’a qu’une épouse, il est courant qu’une femme prenne deux frères pour maris »34.

La religion cinghalaise

Qu’en est-il alors pour Knox de la religion au royaume de Kandy ? Le jeune prisonnier s’est posé beaucoup de questions concernant le Bouddhisme, l’Hindouisme et les cultes populaires animistes et magiques, pour lesquels il ne sait offrir d’explications convaincantes35.

Au XVIIe siècle, les trois cultes auxquels les Cinghalais font leurs dévotions sans distinction, cohabitent. La séparation radicale entre Bouddhisme et Hindouisme qu’on observe à partir du XIXe siècle serait donc un produit de la période coloniale et d’une quête d’identité encouragée par la division de la société ceylanaise en catégories définies par les Britanniques. La société observée par notre auteur est ainsi beaucoup plus tolérante et plus syncrétique que celle du Ceylan colonial.

S’il est à l’écoute de la nature et des gens qu’il côtoie, Knox demeure réfractaire à l’idéologie religieuse cinghalaise. Notre captif est conforté dans sa foi par la lecture quotidienne de deux manuels de dévotion puritaine sauvegardés dans sa captivité et qu’il a appris par cœur36, ainsi que par la trouvaille providentielle d’une Bible anglaise provenant du sac de Colombo, échangée à un paysan cinghalais contre un bonnet tricoté par ses soins. Le rapport au divin de notre captif ne saurait être qu’individuel et non collectif ou ritualisé à l’extrême, aussi notre auteur est-il incapable de déceler chez les Cinghalais un sentiment religieux comparable au sien.

Le polythéisme et les représentations plastiques du bouddhisme ne font qu’ajouter à sa confusion. Parlant la langue cinghalaise, mais ignorant des textes archaïques rédigés en pâli, Knox ne sait si Bouddha « Buddou » est un dieu qui vient s’ajouter au panthéon hindouiste, ou s’il s’agit d’une divinité particulière. Il en conclut que les Cinghalais sont avant tout un peuple superstitieux, leur rapport au religieux étant fondé sur la crainte, la prière et les offrandes propitiatoires, seules à même de soulager leurs malheurs.

En revanche, ce sont les signes extérieurs et matériels de la religion locale, les trois différents ordres du clergé, la puissance financière des monastères, les cultes magiques des campagnes, omniprésents, qui retiennent son attention.

Mais les rites religieux qu’il observe de plus près sont loin des grands centres monastiques et des villes. Ils appartiennent à une religion populaire, rurale et animiste, rattachée à un hindouisme archaïque sans doute antérieur à l’arrivée du Bouddhisme dans l’île et qu’il nomme « devil-worship » ou « culte du diable ».

Alors que dans le Bouddhisme et l’Hindouisme, le végétarianisme et l’absence de sacrifices d’animaux sont la règle, dans les campagnes et villages où Knox est assigné, les sacrifices de poules, de coqs accompagnent quotidiennement l’exorcisme des esprits malins et des maladies. Sans doute notre captif peut-il rapprocher la sorcellerie et la magie cinghalaises de ce qui existait encore dans les campagnes anglaises du XVIIe siècle. Il observe des possessions diaboliques, des transes, et affirme qu’il a lui-même entendu le Malin hurler comme un chien enragé dans les campagnes à la nuit tombée. Toutefois, ajoute-t-il, « les cris du diable ne s’entendent que dans les hautes terres kandyennes, pas sur la côte »37. On le sent, s’il est un culte auquel il accorde quelque crédit à Ceylan, c’est celui‑là.

Conclusion

L’évasion de Knox et de son compagnon, Stephen Rutland, relatée en épilogue est un récit d’aventure captivant qui a fait une partie du succès de la Relation Historique. Or les deux hommes n’ont dû leur salut qu’à la connaissance intime qu’ils avaient du royaume et de ses habitants. Risquant leur vie, et surtout une mort atroce s’ils étaient capturés (empalés ou piétinés par les éléphants), c’est déguisés en marchands ambulants qu’ils ont parcourus, pieds nus, les 180 kilomètres les séparant de leur salut, une garnison hollandaise à Aripu, sur la côte nord-ouest de l’île.

Dans cette aventure, ils ont adopté toutes les qualités et les travers des Cinghalais. Athlétiques, vêtus seulement d’un pagne, barbus et chevelus, ils se déplacent à la lumière de la lune et des étoiles, mentent effrontément à tous ceux qu’ils rencontrent. Leur connaissance de la nature leur permet d’éviter les dangers qui les guettent, les éléphants sauvages, les tigres, les buffles, les aborigènes veddahs qui s’empresseraient de les remettre au roi kandyen et à son supplice du pal.

Si la personnalité de Knox est abrupte, ses préjugés moraux évidents, sa vision des femmes désolante, la Relation Historique s’achève sur une note héroïque qui présage les vertus attendues des bâtisseurs d’Empire : la victoire d’une conscience individuelle, du courage, de l’esprit d’entreprise, de l’énergie, sur la fatalité et l’adversité ; le racisme et l’arrogance en moins.

Il n’empêche, son expérience de captif désormais loin derrière lui, Knox, de retour en Angleterre, avide nous dit-il de « récupérer le temps perdu », s’enrichira comme capitaine négrier sur la côte ouest de Madagascar au service de l’« Honorable Compagnie » anglaise38.

1 R. Knox, An Historical Relation of the Island of Ceylon, London, 1681 ; l’édition utilisée, ci-après An Historical Relation, London, J. Mawman, 1817

2 R. Knox, op. cit., p. 122.

3 Charles II Stuart tenant à interviewer une heure entière son auteur (1683).

4 Appartenant aux autres récits collationnés au XVIIe siècle par la East India Company la Relation Historique de Knox correspond aux tentatives

5 L’origine en est l’attitude du colonisateur britannique au XIXe siècle lorsqu’il accorde aux Cinghalais un statut de majorité privilégiée s’

6 Voir les très nombreuses références à Knox chez d’éminents historiens sri lankais, en particulier K.M. De Silva, History of Sri Lanka, Colombo

7 Celles d’un François Bernier au XVIIe ou de Buffon, Carl von Linné, ou encore François Auguste Péron, concernant une théorie des « races humaines »

8 Voir Pierre-André Taguieff, La Force du préjugé. Essai sur le racisme et ses doubles, Paris, La Découverte, « Armillaire », 1988 ; rééd. Gallimard

9 R. Knox, An Historical Relation, p. 244.

10 Expression heureuse de S. D. Saparamadu, in « Introduction », An Historical Relation of Ceylon, 1rst ed. 1958, Colombo, Tisara Prakasakayo, 2006, p

11 Notre auteur, autodidacte, est un de ces jeunes puritains qui cherchent par leur énergie et leur foi, un individualisme naissant, à reconquérir le

12 Détails fournis par R. Knox, in Maniscripts of my owne Life [sic] insérés dans l’édition originale de An Historical Relation… découverte à la

13 R. Knox, An Historical Relation, op. cit., p. 122.

14 R. Knox, An Historical Relation, op. cit., p. 61-62.

15 Ce qui échappe à Knox dans cette « nonchalance cinghalaise » est sans doute l’incapacité où il se trouve d’analyser le poids du Bouddhisme

16 Ibid., p. 122-126.

17 Ancienne chronique ceylanaise rédigée en pali, elle couvre la période 550 avant notre ère à 362 après notre ère. Une chronique postérieure, le

18 R. Knox, An Historical Relation, op. cit., p. 126-127.

19 Ibid., p. 128.

20 Ibid., p. 128.

21 Ibid., p. 76-77.

22 Ibid., p. 374-375, l’envoyé français était un certain Laisne de Nanclars de Lanerolle, retenu à Ceylan, il se mariera avec une Cinghalaise et aura

23 Ibid., p. 273-274.

24 Terme provenant du cinghalais hamudurwa, indiquant la majesté ou la noblesse.

25 R. Knox, An Historical Relation, op. cit., p. 133.

26 Ibid., p. 65.

27 R. Knox, An Historical Relation, op. cit., p. 130.

28 Sur ce point, voir S.D. Saparamadu, op. cit., « Introduction », p. 16.

29 R. Knox, An Historical Relation, op. cit., p. 181-182.

30 R. Knox, An Historical Relation, op. cit., p. 296-297.

31 Matthieu, 19:11-12.

32 R. Knox, An Historical Relation, op. cit., p. 184.

33 Ibid., p. 185.

34 Ibid., p. 189 ; la polyandrie semble attestée dans le Mahabharata, Draupadi est l’épouse des cinq frères Pandava. Sur la polyandrie kandyenne, voir

35 Il faudra attendre le début du XIXe et la fondation de la Royal Asiatic Society en 1823 pour que des savants européens parviennent à évaluer le

36 Il s’agit de classiques de la méditation puritaine : The Plain Man’s Pathway to Heaven, (1601) d’Arthur Dent, et The Practice of Piety (1611) de 

37 R. Knox, An Historical Relation, op. cit., p. 155-156.

38 Sur la fin de la carrière de Knox, voir A. Molet-Sauvaget, « Extraits, traduits et annotés, de textes de Robert Knox sur la côte ouest de

1 R. Knox, An Historical Relation of the Island of Ceylon, London, 1681 ; l’édition utilisée, ci-après An Historical Relation, London, J. Mawman, 1817, fidèle à l’originale de 1681, est celle dont sont tirées nos citations.

2 R. Knox, op. cit., p. 122.

3 Charles II Stuart tenant à interviewer une heure entière son auteur (1683).

4 Appartenant aux autres récits collationnés au XVIIe siècle par la East India Company la Relation Historique de Knox correspond aux tentatives anglaises de classification et de repérage botanique pour développer les échanges et les cultures entre l’océan Indien et l’Atlantique.

5 L’origine en est l’attitude du colonisateur britannique au XIXe siècle lorsqu’il accorde aux Cinghalais un statut de majorité privilégiée s’engageant, par le traité qui suit la prise de Kandy en 1815, à protéger la religion bouddhiste.

6 Voir les très nombreuses références à Knox chez d’éminents historiens sri lankais, en particulier K.M. De Silva, History of Sri Lanka, Colombo, Vijitha yapa Publications, 2003.

7 Celles d’un François Bernier au XVIIe ou de Buffon, Carl von Linné, ou encore François Auguste Péron, concernant une théorie des « races humaines », au fond, contraire au christianisme.

8 Voir Pierre-André Taguieff, La Force du préjugé. Essai sur le racisme et ses doubles, Paris, La Découverte, « Armillaire », 1988 ; rééd. Gallimard, « Tel », 1990.

9 R. Knox, An Historical Relation, p. 244.

10 Expression heureuse de S. D. Saparamadu, in « Introduction », An Historical Relation of Ceylon, 1rst ed. 1958, Colombo, Tisara Prakasakayo, 2006, p. 12. L’auteur signale qu’à la fin de son règne Rajasingha avait « collectionné » plus de 500 captifs européens.

11 Notre auteur, autodidacte, est un de ces jeunes puritains qui cherchent par leur énergie et leur foi, un individualisme naissant, à reconquérir le Paradis Terrestre : cf. le Paradise Regained de J. Milton.

12 Détails fournis par R. Knox, in Maniscripts of my owne Life [sic] insérés dans l’édition originale de An Historical Relation… découverte à la Bodléienne d’Oxford en 1900.

13 R. Knox, An Historical Relation, op. cit., p. 122.

14 R. Knox, An Historical Relation, op. cit., p. 61-62.

15 Ce qui échappe à Knox dans cette « nonchalance cinghalaise » est sans doute l’incapacité où il se trouve d’analyser le poids du Bouddhisme Theravada (Hinayana) dans les mentalités.

16 Ibid., p. 122-126.

17 Ancienne chronique ceylanaise rédigée en pali, elle couvre la période 550 avant notre ère à 362 après notre ère. Une chronique postérieure, le Culavamsa, poursuivit la tradition jusqu’à l’arrivée des Britanniques en 1815.

18 R. Knox, An Historical Relation, op. cit., p. 126-127.

19 Ibid., p. 128.

20 Ibid., p. 128.

21 Ibid., p. 76-77.

22 Ibid., p. 374-375, l’envoyé français était un certain Laisne de Nanclars de Lanerolle, retenu à Ceylan, il se mariera avec une Cinghalaise et aura une descendance dans l’île.

23 Ibid., p. 273-274.

24 Terme provenant du cinghalais hamudurwa, indiquant la majesté ou la noblesse.

25 R. Knox, An Historical Relation, op. cit., p. 133.

26 Ibid., p. 65.

27 R. Knox, An Historical Relation, op. cit., p. 130.

28 Sur ce point, voir S.D. Saparamadu, op. cit., « Introduction », p. 16.

29 R. Knox, An Historical Relation, op. cit., p. 181-182.

30 R. Knox, An Historical Relation, op. cit., p. 296-297.

31 Matthieu, 19:11-12.

32 R. Knox, An Historical Relation, op. cit., p. 184.

33 Ibid., p. 185.

34 Ibid., p. 189 ; la polyandrie semble attestée dans le Mahabharata, Draupadi est l’épouse des cinq frères Pandava. Sur la polyandrie kandyenne, voir James Emerson Tennent, Ceylon, Physical, Historical & Topographical, 2 vol. London, 1859 ; et Prince Pierre de Grèce, « Polyandry and the kinship group », 1955.

35 Il faudra attendre le début du XIXe et la fondation de la Royal Asiatic Society en 1823 pour que des savants européens parviennent à évaluer le message et la signification du Bouddhisme en termes intelligibles à des Occidentaux ; les précurseurs furent Antoine- Léonard de Chézy et Eugène Burnouf avec son Essai sur le Pali, publié en 1826. Max Muller (1823-1900) disciple de Burnouf, contribua à son tour au développement d’études sur le Bouddhisme en Occident.

36 Il s’agit de classiques de la méditation puritaine : The Plain Man’s Pathway to Heaven, (1601) d’Arthur Dent, et The Practice of Piety (1611) de Lewis Bayly.

37 R. Knox, An Historical Relation, op. cit., p. 155-156.

38 Sur la fin de la carrière de Knox, voir A. Molet-Sauvaget, « Extraits, traduits et annotés, de textes de Robert Knox sur la côte ouest de Madagascar en 1685 et 1690 », in Études Océan Indien, INALCO, n° 10, 1988, p. 75-102.