L’avenir linguistique de Mayotte par rapport à la politique linguistique, l’éducation plurilingue et la forme écrite des langues autochtones : la perception des étudiants du premier cycle

The linguistic future of Mayotte concerning language policy, multilingual education and the written form of the native languages: the attitudes of undergraduate students

Miki Mori

p. 113-130

Citer cet article

Référence papier

Miki Mori, « L’avenir linguistique de Mayotte par rapport à la politique linguistique, l’éducation plurilingue et la forme écrite des langues autochtones : la perception des étudiants du premier cycle », Carnets de recherches de l'océan Indien, 1 | -1, 113-130.

Référence électronique

Miki Mori, « L’avenir linguistique de Mayotte par rapport à la politique linguistique, l’éducation plurilingue et la forme écrite des langues autochtones : la perception des étudiants du premier cycle », Carnets de recherches de l'océan Indien [En ligne], 1 | 2018, mis en ligne le 20 février 2023, consulté le 21 novembre 2024. URL : https://carnets-oi.univ-reunion.fr/149

Mayotte est un nouveau département français, qui met en avant la langue française pour son intégration dans la République et pour la réussite scolaire de ses jeunes. L’enjeu linguistique est de savoir comment cette île, en pleine (re)création identitaire, pourrait préserver ses deux langues autochtones (le shimaore et le kibushi) et promouvoir le français. Il est fondamental de comprendre les attitudes des acteurs principaux de l’île, tels que les étudiants de premier cycle du CUFR de Mayotte, car ils sont les futurs enseignants, commerçants, et élus. Pour comprendre leurs perceptions des lan­gues, j’ai effectué des questionnaires (211 réponses) et des entretiens (11 auprès d’étudiants ayant participé à l’enquête). Les résultats montrent une différence significative des perceptions de la langue française et des langues maternelles confondues. Les participants pensent que les trois langues sont importantes, mais que la forme écrite de leur langue maternelle a moins de valeur que la forme parlée, alors que pour le français les deux ont le même mérite. Ces résultats suggèrent que le rôle du shimaore et du kibushi écrit n’est pas bien défini. Les résultats qualitatifs confirment des opinions variées vers les formes écrites du kibushi et du shimaore et sur le rôle de l’éducation nationale dans la préservation de ces langues. Les résultats sont comparés aux situations similaires dans les îles francophones de l’océan Indien.

Mayotte is the most recent French department and it is prioritizing the French language in order to facilitate its integration into the French republic while helping local youth excel in school. What is at stake is how this island in the process of identity (re)creation, can at once preserve its two native languages (Shimaore and Kibushi) and promote French. Because they are the future teachers, business people, and elected of Mayotte, it is important to know the language attitudes of the undergraduate students at the CUFR of Mayotte. To understand their linguistic attitudes, I carried out a two-part study: a survey with 211 participants followed by 11 interviews with participants from the survey. Results show a significant difference between attitudes toward the French language and those towards the native languages combined. Although participants thought that the three languages were important, they nevertheless laid less emphasis on the written form of their native language. For French, both forms carried equal weight. These results suggest that the role of the written form of Shimaore and Kibushi is not well-defined. The qualitative results confirm an opinion of uncertainty toward written Shimaore and Kibushi. Opinion varied toward the role of the French public education system and the preservation of the native languages, specifically in terms of bilingual schooling. The linguistic and educational situation in other French-speaking islands in the Indian Ocean is discussed.

DOI : 10.26171/carnets-oi_0107

Introduction

« Tu as le droit et en même temps le devoir de connaître les deux cultures ».

La citation ci-dessus vient d’une étudiante mahoraise du centre universitaire de Mayotte qui participe à une enquête sur les attitudes envers les langues de l’île, le shimaore, le kibushi, et le français. Cette étudiante parle du besoin des Mahorais de garder leur langue maternelle. Ses mots résument d’une façon percutante la situation linguistique à Mayotte. D’un côté, il y a le droit linguistique, un thème que les étudiants de l’enquête ont abordé en parlant du rôle de l’éducation nationale avec l’apprentissage de la langue. D’un autre côté, il y a l’idée que connaître les langues maternelles et le français est une obligation à affronter. Ces deux thèmes d’obligation et de droit, surtout pour les langues autochtones, sont actuellement très pertinents à Mayotte, nouveau département français depuis 2011. Les langues de Mayotte portent leur histoire de migrations et de colonisation, en ayant des traces arabes, sakalavas et bantous. En même temps, Mayotte met en avant la langue française pour son intégration dans la République et pour la réussite scolaire des jeunes mahorais. En conséquence, l’enjeu linguistique le plus important est de savoir comment Mayotte, en pleine mutation et (re)création identitaire, pourrait à la fois préserver ses langues locales et promouvoir la langue française.

Les attitudes de langues, la scolarisation et la francophonie

Tout locuteur d’une langue adopte des attitudes (des perceptions, des opi­nions) avec des dimensions affectives, cognitives et comportementales1 envers sa langue et les autres langues. Ces attitudes peuvent être superficielles ou montrer une idéologie plus profonde. En effet, en étudiant de telles attitudes il est possible d’accéder à certaines croyances et idéologies2. La recherche sur les attitudes de langues aide à mieux comprendre le statut et le rôle de la langue dans une culture, et en général les actions entreprises autour des thèmes linguistiques. Cet axe de recherche établi est robuste3, et constitue un carrefour important pour les situations plurilingues où les attitudes linguistiques rencontrent la scolarisation (surtout avec des langues régionales).

Dans la francophonie, le statut de langues régionales a été renforcé en 2000, en identifiant les langues régionales comme « patrimoine linguistique de la Nation »4. Le paysage francophone est assez varié sur les attitudes de langues et la scolarisation en langue régionale. Il n’est pas question ici de fournir un résumé exhaustif de ce paysage. En revanche, je propose de décrire le contexte linguistique de quelques îles francophones de l’océan Indien qui partagent des similitudes avec Mayotte : La Réunion, l’île Maurice et les Seychelles. À La Réunion, le créole réunionnais est bien étudié, et sa place dans l’éducation a fortement augmenté malgré (ou à cause) des signes montrant un taux de transmission du créole de mère à enfant en diminution5 et une langue française dominante6. En effet, le créole représente une partie importante de l’identité réunionnaise, et des efforts conséquents pour le maintenir sont faits, comme par exemple la création du CAPES créole réunionnais en 2001, ainsi que l’augmentation, chaque année, des écoles primaires bilingues sur l’île7. Des recherches sur les attitudes envers le créole ont démontré que son utilisation dans l’école est soutenue, surtout par les jeunes, afin de protéger la langue, la culture, et l’identité de l’île ; toutefois, il demeure optionnel8. Actuellement, il semble que le créole à La Réunion prend de plus en plus de place dans la vie scolaire et il y a une forte volonté de le préserver comme patrimoine insulaire.

À Maurice, en revanche, les locuteurs du créole mauricien ne s’accordent pas sur la place de cette langue à l’école. Même s’il est proposé dans certaines écoles primaires depuis 20129, des enquêtes sur les attitudes ont montré que la population est divisée sur ce sujet10. Certains évoquent le fait que l’île est isolée et qu’il faut parler l’anglais ou le français pour pouvoir en sortir et trouver du travail. Pour eux, le créole doit rester dans les espaces privés et l’école doit se consacrer à l’apprentissage de langues internationales.

La situation aux Seychelles est encore différente, avec trois langues nationales, le créole seychellois, l’anglais, et le français. Le créole, bien qu’il soit enseigné à l’école primaire et secondaire (moins au lycée), occupe une place surtout orale. Son rôle à l’école est parfois remis en question, particulièrement pour sa forme écrite, et une préférence est donnée à l’anglais pour les activités officielles, alors que le créole demeure pour les activités orales11. En effet, il a été montré que la mauvaise réputation du créole est liée à l’arrêt de son apprentissage à l’école12.

À Mayotte, il y a très peu d’études publiées sur les attitudes envers les langues et particulièrement sur la place du shimaore et du kibushi à l’école. Une étude a montré des attitudes mixtes envers le shimaore ou le français, surtout au sein de la population mahoraise13. Globalement, utilisation et attitudes envers les langues autochtones révèlent une grande variété de situations. Ce constat et l’absence d’études sur le sujet à Mayotte nous amènent à nous interroger sur l’avenir linguistique de ce nouveau département français. Deux questions initiales sont proposées dans cet article :

  1. Quelle importance donnent les étudiants du Centre Universitaire de Formation et de Recherche (CUFR) de Mayotte aux formes écrites et orales des trois langues principales à Mayotte (le shimaore, le kibushi et le français) ?

  2. Que pensent certains étudiants des langues écrites et orales de Mayotte, notamment dans le cadre de la scolarisation ?

Méthodes

La recherche a eu lieu au centre universitaire de Mayotte et fait partie d’une étude plus vaste que les questions posées dans cet article. Le travail est composé de méthodes mixtes, d’un questionnaire permettant de traiter la question 1 ci-dessus d’une façon quantitative et d’entretiens pour traiter la question 2 d’une façon quali­tative. Le but de l’entretien (question 2) était de mieux comprendre les résultats quantitatifs du questionnaire en posant des questions sur la valeur et l’utilité des formes écrites et orales ainsi que d’autres sujets liés, tels que l’identité, la scolarisation et la sophistication des langues. En revanche, du fait qu’il n’y a que 11 entretiens, des analyses quantitatives sur ces derniers ne sont pas pertinentes.

L’enquête, réalisée par internet, était ouverte à tous les étudiants du centre et mise en ligne entre avril 2016 et janvier 2017. Les entretiens ont été réalisés entre février et mai 2017. Considérant que mes travaux se focalisent sur les étudiants parlant les langues autochtones comme langue maternelle, les huit participants dont le français est leur langue maternelle ont été exclus des analyses. Le tableau 1 montre le profil des personnes intérrogées (211 réponses sur les 1 053 étudiants que compte le CUFR en 2016-2017). Le questionnaire consiste en une quarantaine de questions (voir l’annexe) choisies pour évaluer l’opinion des étudiants envers le shimaore, le kibushi et le français d’un point de vue général, mais aussi scolaire, à Mayotte. La formulation des questions appelait l’étudiant à donner son avis sur des postulats du type « Écrire en français est important » sur une échelle Likert de 5 points (1 étant « pas du tout d’accord » et 5 « tout à fait d’accord »). Par la suite, les différences d’opinions selon le type de questions posé et les langues maternelles ont été analysées à l’aide de tests non paramétriques de Kruskal Wallis. Ces analyses ont été réalisées sous R.

Tab. 1 : Information démographique des participants à l’enquête

Sexe

Masculin

60

(28 %)

Féminin

151 (72 %)

Filière

Lettres modernes

52

(25 %)

Géographie

52 (25 %)

AES*

47

(22 %)

Droit**

24

(11 %)

Boursier

Oui

170

(81 %)

Non

41 (19 %)

Ordinateur à la maison

Oui

134

(64 %)

Non

77 (36 %)

Langue maternelle

Shimaore

176

(83 %)

Kibushi***

35 (17 %)

Dialecte de shimaore (bantou)

Shimaore (Mayotte)

129

(61 %)

Shindzuani (Anjouan)

40 (19 %)

Shingazidja (Grande Comore)

6

(2 %)

Shimwali (Mohéli)

1

Langue seconde

Français

190

(90 %)

Shimaore

7

(3 %)

Kibushi

11

(5 %)

Autre

3

(1 %)

L’âge du début d’apprentissage de langue seconde

Entre 1 et 5 ans

118

(56 %)

Entre 6 et 10 ans

86

(41 %)

Plus de
11 ans

7

(3 %)

*Administration Economique et Sociale.
**Le reste était en Sciences de la Vie (23 ; 11 %), Mathématiques (12 ; 6 %), et Pluridisciplinaire (1).
***Kibushi est aussi connu comme « shibushi ».

Concernant les entretiens, certains participants ont été choisis par rapport à leur réponse aux quatre questions de l’enquête et en fonction de leur langue maternelle et de leur sexe afin d’avoir une représentation équilibrée. J’ai essayé d’avoir autant de kibushiphones que de shimaorephones, des femmes et hommes, et des étudiants ayant des perceptions plus positives envers les langues autochtones que négatives. Au total, 9 entretiens en présentiel (lors de l’entretien 7, il y avait deux étudiants, mais je le comptabilise comme un seul entretien) et 2 par échanges de courriels ont pu être réalisés par mes soins. Les entretiens ont été enregistrés grâce à un dictaphone (modèle Sony IC Recorder) et ont été retranscrits par l’auteur. Ils ont duré entre 20 et 60 minutes et étaient semi-ouverts : je leur ai demandés d’élaborer leurs réponses de la façon suivante, « pour cette question, vous avez mis “3”. Pouvez-vous m’expliquer votre réponse ? ». Je les ai également interrogés sur leur situation familiale quant aux langues et leur parcours de scolarisation, en abordant les questions sur le rôle des langues dans l’éducation nationale et l’avenir linguistique de Mayotte. Toute participation à l’enquête était volontaire, et pour le questionnaire, une loterie comprenant une tablette a été proposée comme potentielle récompense. Les entretiens ont ensuite été analysés par la méthode de codage thématique de Strauss14 afin de trouver les thématiques démontrées en figures 2 et 3.

Résultats

Question 1 : Analyses statistiques des 4 phrases sur les langues

Les résultats ci-dessous portent sur la question de valeur des langues à Mayotte, dans la forme écrite et orale. Les quatre phrases sont : 1. Parler en français est important. 2. Écrire en français est important. 3. Parler dans ma langue maternelle est important. 4. Écrire dans ma langue maternelle est important. Globalement, les participants pensent que les trois langues sont importantes, mais les formes écrites et orales du français sont plus importantes que les formes écrites et orales du shimaore et du kibushi. En addition, ils pensent que la forme écrite de leur langue maternelle est moins importante que la forme orale. Les analyses montrent une différence significative (Kruskall Wallis, χ² = 137.7,df = 1, p<0,05) entre les binômes de questions 1 et 2 d’une part et 3 et 4 d’autre part, les langues maternelles étant confondues (voir figure 1). La figure 1 montre les résultats confondus parce qu’il n’y a pas de différence significative entre le shimaore et le kibushi quant aux réponses pour le français versus les langues maternelles, c’est-à-dire questions 1 et 2 contre 3 et 4 (le shimaore : Kruskal-Wallis χ² = 123.83, df = 1, p<0,05 ; le kibushi : Kruskal-Wallis χ² = 15.93, df = 1, p<0,05). Ce résultat indique une importance accrue de la langue française par rapport à la langue maternelle à Mayotte. Aucune différence n’a été relevée pour l’île d’origine (Anjouan : Kruskal-Wallis χ² = 59.2, df = 3, p<0,05 ou Mayotte : Kruskal-Wallis χ² = 169.66, df = 3, p<0,05). De plus, pour le français, la forme écrite et la forme orale sont au même niveau d’importance (Kruskall Wallis, χ² = 0.6, df = 1, p>0,05).

Pour le shimaore et le kibushi, il existe également une différence significative de réponses entre les questions 3 et 4 (Kruskall Wallis, χ² = 76.0, df = 1, p<0,05), où la valeur de question 3 (langue maternelle orale) est plus importante que pour la question 4 (langue maternelle écrite), les langues maternelles encore confondues. Ces opinions sont analogues pour le shimaore et le kibushi (le shimaore : Kruskal-Wallis χ² = 54.34, df = 1, p<0,05 ; le kibushi : Kruskal-Wallis χ² = 22.766, df = 1, p<0,05), vu que ces résultats montrent que parmi les quatre phrases en question, celle qui se pose sur la forme écrite du shimaore et du kibushi incite des opinions les plus variées, avec certains participants voyant l’importance de la forme écrite, d’autres ne voyant pas son importance et certains qui ne sont pas sûrs.

Fig. 1 : Résultats sur 4 phrases de l’importance orale et écrite des langues

Fig. 1 : Résultats sur 4 phrases de l’importance orale et écrite des langues

FR_oral = français oral ; FR_ecrit = français écrit ;
MAT_oral = langue maternelle orale ; MAT_ecrit = langue maternelle écrite

Question 2 : Les thématiques des entretiens quant à l’importance des langues

L’analyse des entretiens suggère des opinions variées sur le sujet des langues et leur rôle à Mayotte ainsi qu’à l’école. Deux thématiques majeures ont été trouvées : l’utilité et la valeur. En revanche, les opinions envers le shimaore et le kibushi sont très similaires, donc le terme « langues autochtones » (désormais LA) regroupe ces deux langues. De plus, dans les deux thématiques, les opinions se polarisent soit positivement soit négativement pour les LA et uniquement positivement pour le fran­çais. Ces deux thématiques sont principalement liées à 4 explications : l’identité, la réussite, l’écriture, et l’étude (y compris la normalisation par un système d’éducation). Les figures 2 et 3 montrent ces deux thématiques et leurs explications par rapport au français et aux LA. La figure 2 montre des étudiants exprimant que le français est l’outil de la réussite et de l’identité (française) et que sa valeur tient au fait qu’il soit écrit et étudié. Par contre, les opinions envers les LA varient (figure 3), avec des opinions positives et négatives par rapport à l’utilité et à la valeur. Ces résultats seront maintenant commentés d’abord pour les opinions vis-à-vis du français, suivis des opinions positives envers les LA, et finalement les opinions négatives des LA. Quand elles sont pertinentes, des citations des entretiens sont utilisées afin de souligner l’argument et donner une voix aux participants.

Fig. 2 : Thématiques sur la langue française

Fig. 2 : Thématiques sur la langue française

Flèches solides = des opinions établies

Fig. 3 : Thématiques sur les langues autochtones

Fig. 3 : Thématiques sur les langues autochtones

Flèches solides = des opinions établies ; flèches en ligne interrompue = des opinions positives d’un avenir souhaité ; flèches en pointillés = des opinions négatives

Le français comme outil de réussite et une valeur de l’identité

Dans les entretiens, l’utilité et la valeur du français sont claires sur trois aspects : l’identité administrative, la réussite, et le prestige. En effet, le français est l’outil linguistique de la réussite scolaire et par conséquent économique. Le français est la langue de scolarisation, et gage d’une réussite scolaire, un besoin fondamental. Le français est aussi fondamental pour obtenir du travail et communiquer dans un cadre professionnel. Cette langue porte également une valeur et une utilité identitaire, car elle est la langue de la République. Pour l’identité administrative, les étudiants ont exprimé l’idée qu’une île française doit, par défaut, parler le français. Ceci est devenu une partie de l’identité mahoraise où Mayotte et la France ne font plus qu’une avec des habitudes linguistiques qui doivent s’adapter. De plus, mis à part l’identité, le thème d’utilité du français a été exprimé. Un étudiant a dit que c’est un handicap de ne pas parler le français dans des situations administratives, comme dans un bureau, indiquant que cette langue est un outil nécessaire pour communiquer (entretien 2). Enfin, le français est riche de valeurs, car il est écrit et étudié. Ceci se traduit par une langue française de haut prestige qui fournit des opportunités. Son prestige vient du fait qu’elle est normalisée avec des règles de grammaire et d’orthographe. Ces étudiants, élevés dans le système éducatif français, connaissent bien ces règles qu’ils pratiquent depuis des années. Spécifiquement, les étudiants ont parlé de l’amplitude de vocabulaire disponible en français, des règles de grammaire et d’orthographe, ainsi que de la complexité de cette langue. Un étudiant a dit que c’était pendant ses études à l’école qu’il s’est aperçu que le français est « assez compliqué » (E5).

Finalement, un étudiant qui propose de promouvoir l’étude des LA énonce qu’il trouve normal que les Mahorais parlent plus le français, lui-même s’exprime mieux en français :

[1]

« Je pense qu’en France maintenant… on passe presque toute notre vie quasiment, surtout dans la jeunesse, dans l’éducation nationale. Je trouve normal que le jeune s’exprime plus en français qu’en shimaore et kibushi… Pour moi toute simplement j’arrive mieux m’expliquer en français qu’en shimaore ou shibushi… Donc pour moi c’est justement la dominance de la langue française » (E2)15.

Lui, qui parle les trois langues de l’île, persuadé que les trois ont de la valeur, trouve aussi que la dominance du français chez les jeunes Mahorais est « normale ». Logiquement, il attribue ce fait au temps conséquent passé à l’école. Il semble même suggérer que les élèves passent autant sinon plus de temps de leur vie avec leurs professeurs (souvent métropolitains) qu’avec leurs parents (souvent non franco­phones). Cette citation s’intéresse à la question du rôle de l’éducation nationale et des langues à Mayotte, et surtout elle émet un avis de normalité. Les opinions sur la valeur du français se résument clairement à une langue complexe, riche et réglée. En revanche, les opinions formulées pour les LA ne sont globalement pas uniformes ou positives. Les sections suivantes abordent les opinions polyphoniques envers les LA, en relatant ce qui est et ce qui sera ou serait l’avenir linguistique et éducatif de Mayotte.

Les langues autochtones comme outil patrimonial

Les attitudes positives envers les LA se regroupent en trois parties : l’identité mahoraise, la scolarisation, et le patrimoine. D’abord, certains étudiants parlent du fait que le shimaore et le kibushi sont une partie centrale de leur identité mahoraise. Par exemple, un étudiant a dit « de toute façon, le shimaore c’est chez nous » (E9). Ils font donc le lien entre Mayotte, l’île, et les LA. Par défaut, les langues de l’île ont de la valeur parce qu’elles y sont parlées. Sur l’idée d’avoir l’école multilingue à Mayotte, certains ont exprimé une opinion positive sinon enthousiaste parce qu’un tel système permettrait aux élèves d’apprendre le français et « leur langue » en même temps (E6). Pour un étudiant, il était important pour les jeunes Mahorais d’apprendre le français, le shimaore et le kibushi, en disant « parler les trois, c’est le top » (E9).

En effet, ce sujet de la préservation et du patrimoine a émergé dans les entretiens au moment où nous discutions de la pertinence. Pour certains, écrire les LA sert à enrichir la personne, mais pour les autres, les écrire permettrait de mettre cet objet transitif, éphémère sous une forme permanente. Les citations ci-dessous montrent cette idée d’un objet fugace qui est en fait un patrimoine qui pourrait être préservé grâce à la forme écrite.

[2]

« Pour le maintien des langues maternelles de génération à génération, il faut pouvoir écrire et parler le français et le shibushi » (Entretien par Courriel 2).

[3]

« Si on ne commence pas à l’écrire, il y aura plus rien dans quelques années. Il faut commencer faire un travail de recherche pour avoir des règles de l’écriture… il faut mettre sur l’écrit les histoires orales, les valeurs… et de les pérenniser » (E7).

Ces citations synthétisent l’opinion que les LA ont une haute valeur en elles-mêmes, et qu’il est impératif de les préserver en les mettant sur papier. Comme le montre la figure 3, il ne s’agit pas d’une réalité pour les étudiants, mais d’un hypo­thétique avenir. Pour eux, l’avenir linguistique de Mayotte sera un maintien d’une ou plusieurs LA via l’écrit et l’oral.

Dans cet avenir hypothétique, l’éducation nationale pourrait jouer un rôle important si c’est lors de la scolarisation que les Mahorais apprennent la grammaire et la forme écrite. En effet, certains avaient l’opinion que le milieu scolaire pouvait être le lieu où les Mahorais apprennent les LA :

[4]

« C’est notre culture, c’est notre langue… que doit être écrite pour être perpétuée plus tard. Comme on dit, les écrits restent, les paroles s’envolent… Maintenant il faut pas oublier que, justement, c’est la langue maternelle, ça fonde notre identité… Pourquoi pas essayer d’avoir un programme spécifique pour cette langue-là, au minimum à l’école primaire » (E2).

Pour lui, les langues de Mayotte jouent un rôle central dans la construction de l’identité, et on ne pourrait pas avoir l’un sans l’autre. En même temps, il reconnaît l’importance de mettre sur papier ces langues orales et de les étudier à l’école. Et pourtant c’est le même étudiant qui énonce que le français est très important [1] et qu’il est normal que les Mahorais parlent mieux le français que les LA [4]. Effectivement, des opinions complexes envers le rôle des trois langues à Mayotte sont observées.

Les langues autochtones et le manque de valeur, sophistication et utilité

Contrairement aux citations précédentes, pour d’autres, les langues de Mayotte ne portent pas beaucoup de valeur quant à la réussite, l’identité, ou l’utilité. Les raisons de ce manque de valeur sont liées à l’absence de formes écrites et d’études formelles (figure 3). Revient également la question de la valeur et de l’utilité par rapport à la réputation mondiale et la connexion avec la réussite. Les citations ci-dessous montrent des opinions sur la question de l’utilité d’école bilingue :

[5]

« Je cherche un truc qui m’apporterait un avantage. Du coup, tant que je vois pas qu’on aura un avantage dans les années futures, euh, je crois pas » (E1).

[6]

« C’est une langue très bas, bas… Je ne vois pas trop l’utilité de shimaore » (E8).

Dans ces citations, nous retrouvons l’idée que les LA ne présentent pas d’utilité pour la réussite (scolaire ou professionnelle), donc l’école bilingue n’est pas très intéressante. Cette deuxième citation [6] suggère même que les LA sont socialement très « basses » par rapport à une langue comme le français qui est bien établi dans les institutions et parlé par des millions de personnes.

Un autre lien important pour le manque de valeur des LA est l’absence d’une forme écrite et d’une grammaire normative. Ce sujet a été abordé dans les réponses sur l’enquête au sujet de la « sophistication » des langues (voir l’Annexe, questions 28 et 29). En gros, il en ressort que les LA sont sans valeur faute de sophistication. De plus, ces étudiants ne connaissent pas l’orthographe de leur LA et relatent ce fait en comparaison au français :

[7]

« La langue française, il y a des règles, il y a de grammaire, il y a des vocabulaires, orthographe, mais le shibushi, le shimaore il y a rien du tout » (E6).

Cette opinion est liée à plusieurs éléments : le fait que les LA ne sont pas écrites et donc qu’il n’y a pas de forme standard d’orthographe ; le fait que les LA ne sont pas étudiées avec une grammaire normative comme le français ; et finalement, le fait qu’il y a beaucoup de mots empruntés au français. Écrire les LA devient rapidement une tâche compliquée faute de normes sur lesquelles se baser. Un étudiant a constaté qu’avec le manque de règles normalisées « chacun va écrire à sa façon » (E7).

Finalement, sur le sujet de l’école bilingue et de la forme écrite des LA, la citation de l’étudiant ci-dessous montre une opinion contraire à l’opinion émise dans la section [4], car, pour lui, il n’y a pas d’intérêt dans l’apprentissage des LA au niveau de l’éducation nationale :

[8]

« Les deux langues déjà, en fait c’est difficile d’écrire… C’est compliqué… je préfère le français… Je pense qu’enseigner à l’école, non, je ne suis pas d’accord. Je pense que surtout apprendre à le parler, pas l’écrire… » (E4).

Cet étudiant n’est pas d’accord avec l’école bilingue à Mayotte, surtout si c’est pour apprendre à écrire une LA. Pour lui, le français porte la valeur de la réussite scolaire et économique alors que les LA ne portent pas grand-chose. Dans l’entretien, il parlait du fait qu’il voulait maîtriser le français et pour ce faire qu’il voulait passer autant de temps que possible à l’étudier. Pour lui, l’école bilingue empêcherait cette opportunité. De plus, il cite le fait que le processus d’écriture est trop compliqué sans une orthographe normalisée. Il semble que c’est trop d’effort à étudier quelque chose qui pour lui n’apporte pas grand-chose. Pourtant, c’est sa langue maternelle dans laquelle il parle quotidiennement. En effet, les opinions discutées dans cette section suggèrent la présence de l’insécurité linguistique à Mayotte parmi certains individus. Ces individus se trouvent dans une incertitude, où ils ne pensent pas avoir maîtrisé ni le français ni leurs langues maternelles.

Discussion

Les objectifs de cet article étaient d’adresser et de comprendre les perceptions des étudiants mahorais envers les langues de Mayotte. Les analyses statistiques sur l’importance de la forme écrite et orale du français, du shimaore et du kibushi (question 1) montrent une opinion déséquilibrée entre la langue française et les LA de l’île. Il n’y a aucun doute que le français est mis en valeur dans sa forme écrite et orale. Par contre, ces formes n’ont pas le même niveau d’importance pour le shimaore et le kibushi. En effet, alors que la forme orale est importante, les opinions envers la forme écrite varient, de ceux qui ne voient pas l’intérêt à ceux qui le voient, avec entre les deux, ceux qui ne sont pas sûrs.

L’objectif des entretiens qualitatifs (question 2) est de mieux comprendre cette variation d’opinion en abordant le sujet de l’importance du français et des LA ainsi que le rôle de l’éducation nationale et la normalisation de ces LA quant à leur grammaire et leur orthographe. Pour le français, les idées exprimées dans les entretiens expliquent la haute importance du français oral et écrit constatée dans le questionnaire : le français est la langue de communication administrative et scolaire, qui entraîne l’utilisation des deux formes. Pour réussir et agir dans le système français, les étudiants doivent parler et écrire en français. De plus, le fait que les étudiants ont étudié ses règles pendant des années à l’école met en valeur le prestige de cette langue. L’éducation nationale joue certainement un rôle important dans les perceptions d’une langue. Globalement, le prestige et la valeur de la langue française sont bien établis de par sa normalisation (règles grammaticales et orthographiques), de par son utilité administrative et économique, et grâce à son rôle dans l’appartenance à une île française. En revanche, ce n’est pas le cas des LA.

Pour les LA, les opinions exprimées dans les entretiens reflétaient la variation observée dans le questionnaire quant au rôle de la forme écrite. Dans l’ensemble, la forme écrite des LA (ou plutôt l’absence d’une forme écrite normalisée et vulgarisée) reste le cœur de l’enjeu parce qu’elle suscite des questions telles que la scolarisation, l’identité mahoraise et la mémoire collective du peuple de Mayotte. Les perceptions négatives envers les LA semblent provenir d’une lacune de connaissance de la grammaire, du vocabulaire et de l’orthographe. De plus, l’omniprésence du français dans l’éducation nationale et dans l’administration ne laisse pas de place pour d’autres langues. Par contre, malgré ces points, certains entretiens ont eu des opinions positives mais prudentes sur l’avenir des LA. Un optimisme a été exprimé envers la mise en place d’écoles bilingues à Mayotte, la scolarisation des élèves dans leur langue maternelle, et l’utilisation d’une forme écrite pour promouvoir la réussite, la culture et l’identité mahoraise. Certes, c’était avec précaution que certains ont soutenu l’avancement des LA, sachant que le temps presse et qu’il faut agir rapidement malgré le manque de ressources linguistiques comme des manuels scolaires, livres de grammaire et de vocabulaire et des experts formés dans la langue16.

Les entretiens ont dévoilé une division par rapport à l’état actuel et l’avenir des LA. Il semble qu’il s’agisse d’un cercle vicieux, où les LA ne sont pas mises en valeur parce qu’elles ne sont pas normalisées ni écrites, car elles ne portent pas de valeurs pour la réussite. Il se peut que la question d’une situation sans issue engendre la dichotomie des opinions constatée.

Il existe aussi l’aspect de l’histoire culturelle de ces langues à considérer quant à la valeur de la forme écrite. Alors qu’elles sont connues comme langues princi­palement orales, le shimaore écrit a eu une place limitée parmi certains Mahorais scolarisés, sous forme d’alphabet arabe17. Dans l’ensemble, les LA n’ont pas une longue histoire de culture écrite et la préférence pour sa forme orale est évidente. L’histoire de scolarisation de masse à haut niveau (par exemple, au-delà du baccalauréat) n’étant pas vieille, il est possible que la prochaine génération de Mahorais fasse le choix de promouvoir une culture écrite pour les LA. Toutefois, cette tendance à valoriser uniquement la forme orale des LA domine, et cette préférence est observée dans des pays voisins, comme par exemple aux Seychelles, où la longue histoire de la culture orale du créole seychellois semble avoir eu un effet sur les attitudes négatives de l’apprentissage de la forme écrite à l’école18.

Plus important encore, ce manque de valeur de la forme écrite laisse entrevoir plusieurs facteurs importants, comme l’identité, la réussite scolaire, et l’étude formelle du shimaore et du kibushi. Alors que les étudiants ont montré des opinions variées et contrastées envers les LA, ils ont tous conscience que la valeur et l’avenir des LA à Mayotte dépendra de leur place dans l’éducation nationale et de la normalisation de leurs formes écrites. Cette division d’opinion sur le rôle de l’école pour la transmission d’une langue locale n’est pas unique et rappelle le cas d’autres États insulaires comme Maurice19.

En comparant la situation linguistique de Mayotte aux pays insulaires voisins de l’océan Indien, il semble qu’il y a plusieurs scénarii possibles quant à l’avenir linguistique de l’île. Dans le plus simple des cas, il se peut que Mayotte reste diglossique avec la non-utilisation du shimaore et du kibushi à l’école d’une manière normalisée. Dans ce cas-là, il y a un risque que les LA demeurent non valorisées et disparaissent à cause de la non-transmission aux nouvelles générations. Dans un deuxième cas, il se peut que Mayotte fasse l’effort de mettre les LA à l’école primaire comme cela s’est fait aux Seychelles, à La Réunion et à Maurice (ou en Europe dans la région asturienne en Espagne20 et en France Métropolitaine, en Corse21, par exemple). Bien sûr, de la même manière que les citoyens de Maurice sont divisés sur le sujet de la langue de scolarisation, il se peut que le rôle des LA à Mayotte reste un sujet de discorde. Néanmoins, cela n’exclut en rien l’idée d’avoir des écoles bilingues optionnelles sur l’île, pour lesquelles le choix d’y scolariser leurs enfants sera laissé aux parents. Cela dit, ce scénario ne sera probablement pas faisable tant que les formes écrites du shimaore et du kibushi ne seront pas harmonisées et que les règles linguistiques (phonologiques, morphologiques et syntactiques) ne seront pas vulgarisées dans des ateliers et manuels pour que les professeurs puissent être capables de les enseigner aux élèves.

Toutefois, à titre de comparaison, le cas du corse montre qu’il n’est pas nécessaire d’avoir une version officielle d’une langue pour soutenir sa transmission dans un système éducatif. En Corse, l’école primaire bilingue existe malgré le fait qu’il n’y a pas de forme normalisée de la langue. Les Corses ont établi un sens polynomique et donc une reconnaissance du pluralisme dans leur langue22. Pour Marcellesi (1983), une langue polynomique est une langue, « dont l’unité est abstraite et résulte d’un mouvement dialectique et non de la simple ossification d’une norme unique »23. Alors qu’il n’y a pas pour l’instant de projets de recherche sur ce sujet à Mayotte, et vu la variété des formes des langues sur le territoire, il se peut que le Mahorais applique un jour une approche similaire à la Corse.

Concernant les futurs efforts pour une orthographe et une grammaire nor­malisée pour ces LA, d’autres îles comme Les Seychelles, La Réunion et Maurice ont montré que le processus prend du temps. De plus, il semblerait que l’effort d’associations locales et le soutien du peuple soient nécessaires, sans quoi, il est incertain que le statut du shimaore et du kibushi progresse. Par conséquent, pour mieux comprendre le futur des LA à Mayotte, il est impératif de connaître l’opinion et la perception d’autres groupes de la population sur ce sujet, telles que celles des professeurs d’école, qui jouent un rôle important dans l’apprentissage du français et possiblement l’utilisation des LA à l’école primaire.

Finalement, dans les entretiens, les opinions des étudiants ont montré plu­sieurs idéologies envers les langues24, comme l’idée qu’il existe une langue pure, comme le français, que la forme écrite d’une langue porte plus de valeur qu’une langue orale, et qu’une langue sans grammaire normative n’est pas une vraie langue. Bien que cela sorte du cadre de cet article, les idéologies sous-jacentes dans ces entretiens sont assez présentes et il serait intéressant de mieux les comprendre, car elles influencent les décisions prises concernant les activités linguistiques, y compris la scolarisation.

Conclusion

Les perceptions linguistiques des langues de Mayotte sont variées, et les étudiants intérrogés parlent des devoir et droit linguistiques. Il est sans équivoque que la langue française est marquée d’une importante valeur, d’une utilité, et d’un prestige pour les Mahorais. En revanche, le shimaore et le kibushi portent la valeur patrimoniale de l’île de Mayotte. Pour l’instant, elles ne semblent pas en danger de disparition, mais leur rôle dans la société est remis en question. Cette recherche a montré que la valeur de ces langues autochtones est perçue comme secondaire par rapport à celle du français, et que l’utilité de leur forme écrite n’est pas établie. En effet, au cœur de cette question de la forme écrite, réside la légitimité de la langue via une grammaire normative bien établie. Alors que cette insécurité linguistique domine, il semble encore incertain que les valeurs et les perceptions de l’utilité du shimaore et du kibushi s’améliorent dans un futur proche. En complément, si la pérennisation de ces langues est souhaitée, il est autant un droit qu’un devoir pour les Mahorais de travailler sur son aboutissement. Ce qui demande un fort investissement en termes de temps, de moyens, et surtout nécessite l’appui d’une masse critique de la population formée et œuvrant à sa réalisation.

1 Glenn Martinez, Mexican Americans and language: Del dicho al hecho, University of Arizona Press, 2006.

2 Voir David Lasagabaster, « Les attitudes linguistiques : un état des lieux », Ela. Études de linguistique appliquée, n° 4(144), 2006, p. 393‑406.

3 Voir Colin Baker, Language attitudes, Bristol, Multilingual Matters, 1992.

4 https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000387814#LEGIARTI000006386435, Loi n° 2000-1207 du 13 décembre 2000 d’

5 https://issuu.com/ville-du-port/docs/etudescreoles-ipsos Ipsos. Pratiques linguistiques déclarées. L’opinion sur le créole à l’école. Culture et

6 Sandrine Carassou–Benjelloun, « La place des langues dans l’analyse du fonctionnement spatial : la mise à jour d’interactions systémiques », Les

7 http://www.temoignages.re/IMG/pdf/plan-d-action-lcr_2014-2019.pdfThierry Terret, « Feuille de route pour la langue et culture régionales. Plan d’

8 https://issuu.com/ville-du-port/docs/etudescreoles-ipsos

9 Jimmy Harmon, « Epistemology of languages – The socially constructed disputed knowledge about Mauritian Kreol: A socio-historical perspective »

10 Aaliya Rajah-Carim, « Mauritian Creole and language attitudes in the education system of multiethnic and multilingual Mauritius », Journal of

11 Fabrice Barthelemy, « Situation linguistique seychelloise : entre trilinguisme consti­tutionnel et usages individuels », Synergies Algérie, n° 8

12 Mats Deutschmann, et Justin Zelime, « An exploratory study of language attitudes and examination performance among primary and secondary school

13 Josy Cassagnaud, « Langues et identité à Mayotte », in Ancrages identitaires dans l’océan Indien : La Réunion, Madagascar, Mayotte, les Comores

14 Anselm Strauss, Qualitative analysis for social scientists, Cambridge, Cambridge University Press, 1987.

15 Je ne relève pas les particularités et/ou erreurs orthographiques ou de syntaxe des entretiens.

16 Toutefois, pendant les entretiens, certains (comme E6 et E7) ont parlé du fait qu’il existe l’association SHIME (Shimaore Méthodique) qui

17 Foued Laroussi, « Mayotte, une île plurilingue en mutation », dans Mayotte, une île plurilingue en mutation, F. Laroussi (éd), Mamoudzou, Les

18 F. Barthelemy, 2009

19 A. Rajah-Carrim, 2007.

20 Xosé-Antón Riaño, « Les attitudes linguistiques chez de jeunes adolescents dans la principauté des Asturies », Ela. Études de linguistique

21 Robert Blackwood, « Language beliefs and the polynomic model for Corsican », Language Awareness, n° 20(1), avril 2011, p. 17‑30.

22 R. Blackwood, 2011.

23 Jean-Baptiste Marcellesi, « La définition des langues en domaine roman : les enseignements à tirer de la situation corse », dans Actes du congrès

24 Voir Paul Kroskrity, « Language ideologies », dans A companion to linguistic anthropology, A. Duranti (éd.), Hoboken, Blackwell Publishing, 2004

Baker, Colin, Language attitudes, Bristol, Multilingual Matters, 1992.

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Questionnaire

1     

E-mail

2

Pouvons-nous vous contacter par email si nous avons des questions au sujet de vos réponses à l’enquête ?

3

Âge

4

Sexe

5

Ville/village de résidence à Mayotte

6

Semestre au CUFR

7

Filière universitaire

8

Êtes-vous boursier ?

9

Avez-vous un ordinateur personnel chez vous avec une connexion internet ?

10

Quelle est votre langue maternelle ?

11

Si votre langue maternelle est le shimaore, spécifiez de quelle île.

12

Quelle est la seconde langue que vous avez apprise ?

13

Quel âge aviez-vous quand vous avez commencé l’apprentissage de votre seconde langue ?

14

Si vous parlez une troisième ou une autre langue, notez-les ci-dessous.

15

Je parle le français (vous pouvez choisir plusieurs réponses) : à la maison, au travail, dans la rue, au CUFR, dans la bibliothèque, pendant les pauses, avec mes parents, avec mes frères/sœurs, avec mes amis

16

Je parle le shimaore (vous pouvez choisir plusieurs réponses) : à la maison, au travail, dans la rue, au CUFR, dans la bibliothèque, pendant les pauses, avec mes parents, avec mes frères/sœurs, avec mes amis, je ne parle pas le shimaore

17

Je parle le shibushi (vous pouvez choisir plusieurs réponses) : à la maison, au travail, dans la rue, au CUFR, dans la bibliothèque, pendant les pauses, avec mes parents, avec mes frères/sœurs, avec mes amis, je ne parle pas le shibushi

Questions pour répondre par l’échelle Likert de 1 à 5 ; 1 = pas du tout d’accord, 5 = tout à fait d’accord

18    

Je parle le français standard

19

Je parle en français avec un accent

20

Je parle un mélange de français et shimaore ou français et shibushi

21

Parler en français est important

22

Écrire en français est important

23

Parler dans ma langue maternelle est important

24

Écrire dans ma langue maternelle est important

25

C’est important que les gens de Mayotte parlent un français standard

26

C’est important que les gens de Mayotte parlent shimaore

27

C’est important que les gens de Mayotte parlent shibushi

28

La langue française semble plus sophistiquée que le shimaore

29

La langue française semble plus sophistiquée que le shibushi

30

Au CUFR, les étudiants doivent parler seulement en français

31

C’est important que les étudiants au sein du CUFR parlent en français standard

32

C’est important que les étudiants au sein du CUFR écrivent en français standard

33

Quand les étudiants obtiennent leur licence, ils doivent avoir la capacité d’écrire en français avec peu de fautes

34

C’est important de parler en français pour avoir un métier respectable

35

Je suis les cours magistraux en français, facilement et sans problème de compré­hension

36

Je communique en français avec mes enseignants sans problèmes de compréhension

37

Je comprends mes camarades quand ils parlent en français pendant les cours

38

Je lis facilement des romans contemporains en français

39

Je lis facilement des romans classiques en français

40

Je lis facilement des articles académiques en français

41

J’écris en français sans faire de fautes

42

J’écris des dissertations dans un bon français

43

Je donne des exposés avec un bon français

44

Mes enseignants au CUFR pensent que mon niveau de français est le même que celui des étudiants de métropole

45

Mes enseignants au CUFR m’ont suggéré d’améliorer mon français

46

Dans le futur, j’aimerais suivre des ateliers pour améliorer mes compétences en français

47

J’ai besoin d’aide pour améliorer mon français écrit

1 Glenn Martinez, Mexican Americans and language: Del dicho al hecho, University of Arizona Press, 2006.

2 Voir David Lasagabaster, « Les attitudes linguistiques : un état des lieux », Ela. Études de linguistique appliquée, n° 4(144), 2006, p. 393‑406.

3 Voir Colin Baker, Language attitudes, Bristol, Multilingual Matters, 1992.

4 https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000387814#LEGIARTI000006386435, Loi n° 2000-1207 du 13 décembre 2000 d’orientation pour l’outre-mer. Accédé le 16 octobre 2017.

5 https://issuu.com/ville-du-port/docs/etudescreoles-ipsos
Ipsos. Pratiques linguistiques déclarées. L’opinion sur le créole à l’école. Culture et histoire à l’école. Saint-Denis, Ipsos Océan Indien, 2009. Accédé le 16 octobre 2017.

6 Sandrine Carassou–Benjelloun, « La place des langues dans l’analyse du fonctionnement spatial : la mise à jour d’interactions systémiques », Les Cahiers d’Outre-Mer, n° 234, avril 2006, p. 1-17 ; Oakes Leigh, « Beyond diglossia? Language attitudes and identity in Reunion », Journal of Multilingual and Multicultural Development, n° 34(1), 2013, p. 30‑45.

7 http://www.temoignages.re/IMG/pdf/plan-d-action-lcr_2014-2019.pdf
Thierry Terret, « Feuille de route pour la langue et culture régionales. Plan d’actions pour la langue et la culture régionales : le créole dans l’académie de La Réunion », 2014-2019, 2014. Accédé le 16 octobre 2017.

8 https://issuu.com/ville-du-port/docs/etudescreoles-ipsos

9 Jimmy Harmon, « Epistemology of languages – The socially constructed disputed knowledge about Mauritian Kreol: A socio-historical perspective », Island studies, n° 2, juillet 2015, p. 46‑54.

10 Aaliya Rajah-Carim, « Mauritian Creole and language attitudes in the education system of multiethnic and multilingual Mauritius », Journal of Multilingual and Multicultural Development, n° 28(1), 2007, p. 51‑71.

11 Fabrice Barthelemy, « Situation linguistique seychelloise : entre trilinguisme consti­tutionnel et usages individuels », Synergies Algérie, n° 8, 2009, p. 159‑168.

12 Mats Deutschmann, et Justin Zelime, « An exploratory study of language attitudes and examination performance among primary and secondary school pupils in the Seychelles », Island studies, n° 2, juillet 2015, p. 36‑45.

13 Josy Cassagnaud, « Langues et identité à Mayotte », in Ancrages identitaires dans l’océan Indien : La Réunion, Madagascar, Mayotte, les Comores, Maurice, A. Coianiz et P. Fioux (éds.), Paris, L’Harmattan, 2011, p. 237‑262.

14 Anselm Strauss, Qualitative analysis for social scientists, Cambridge, Cambridge University Press, 1987.

15 Je ne relève pas les particularités et/ou erreurs orthographiques ou de syntaxe des entretiens.

16 Toutefois, pendant les entretiens, certains (comme E6 et E7) ont parlé du fait qu’il existe l’association SHIME (Shimaore Méthodique) qui travaille depuis deux décennies sur la normalisation de la forme écrite et l’enseignement du shimaore sur l’île. Malgré ceci, globalement les étudiants ne trouvent pas qu’il s’agisse d’un effort bien établi. Voir Rastami Spelo, « Propositions pour une graphie normalisée des langues de Mayotte – kibushi et shimaore – en caractères latins », dans Plurilinguisme, politique linguistique et éducation. Quels éclairages pour Mayotte ?, F. Laroussi et F. Liénard (éds), Rouen, Université de Rouen, 2011, p. 167‑173.

17 Foued Laroussi, « Mayotte, une île plurilingue en mutation », dans Mayotte, une île plurilingue en mutation, F. Laroussi (éd), Mamoudzou, Les Éditions du Baobab, 2009, p. 11‑48.

18 F. Barthelemy, 2009

19 A. Rajah-Carrim, 2007.

20 Xosé-Antón Riaño, « Les attitudes linguistiques chez de jeunes adolescents dans la principauté des Asturies », Ela. Études de linguistique appliquée, n° 144, avril 2006, p. 427‑439.

21 Robert Blackwood, « Language beliefs and the polynomic model for Corsican », Language Awareness, n° 20(1), avril 2011, p. 17‑30.

22 R. Blackwood, 2011.

23 Jean-Baptiste Marcellesi, « La définition des langues en domaine roman : les enseignements à tirer de la situation corse », dans Actes du congrès des romanistes d’Aix-en-Provence, Sociolinguistique des langues romanes, n° 5, 1983, p. 309‑314.

24 Voir Paul Kroskrity, « Language ideologies », dans A companion to linguistic anthropology, A. Duranti (éd.), Hoboken, Blackwell Publishing, 2004, p. 496‑517.

Fig. 1 : Résultats sur 4 phrases de l’importance orale et écrite des langues

Fig. 1 : Résultats sur 4 phrases de l’importance orale et écrite des langues

FR_oral = français oral ; FR_ecrit = français écrit ;
MAT_oral = langue maternelle orale ; MAT_ecrit = langue maternelle écrite

Fig. 2 : Thématiques sur la langue française

Fig. 2 : Thématiques sur la langue française

Flèches solides = des opinions établies

Fig. 3 : Thématiques sur les langues autochtones

Fig. 3 : Thématiques sur les langues autochtones

Flèches solides = des opinions établies ; flèches en ligne interrompue = des opinions positives d’un avenir souhaité ; flèches en pointillés = des opinions négatives

Miki Mori

Maitre de conférences, sciences du langage, Centre Universitaire de Formation et de Recherche (CUFR) de Mayotte
miki.mori@univ-mayotte.fr