La transformation de l’équipe des Springboks post‑apartheid : la fin d’une période de transition (2013‑2019) ?

The transformation of the Springboks in the post-apartheid era: the end of a transition period (2013‑2019)?

Parwine Patel, Sylvain Cubizolles et Jean-Michel Delaplace

p. 121-136

Citer cet article

Référence papier

Parwine Patel, Sylvain Cubizolles et Jean-Michel Delaplace, « La transformation de l’équipe des Springboks post‑apartheid : la fin d’une période de transition (2013‑2019) ? », Carnets de recherches de l'océan Indien, 7 | -1, 121-136.

Référence électronique

Parwine Patel, Sylvain Cubizolles et Jean-Michel Delaplace, « La transformation de l’équipe des Springboks post‑apartheid : la fin d’une période de transition (2013‑2019) ? », Carnets de recherches de l'océan Indien [En ligne], 7 | 2021, mis en ligne le 01 mars 2023, consulté le 13 mai 2024. URL : https://carnets-oi.univ-reunion.fr/724

En 1995, la coupe du monde de rugby en Afrique du Sud fut le théâtre et l’incarnation de la réconciliation entre « Blancs » et « non Blancs » voulue par le premier président « noir africain » élu démocratiquement, Nelson Mandela. Ce dernier souhaitait alors faire de la sélection nationale des Springboks un symbole d’unité dans un pays longtemps ravagé par les discriminations raciales et le régime de l’apartheid. Le slogan de la fédération sud-africaine de rugby lors de ce moment historique devait réunir tout un pays autour d’« une équipe, un pays » mettant en avant le caractère « non-racial » de l’équipe des Springboks dont les joueurs n’étaient plus sélectionnés par rapport à leurs « races » mais sur le seul critère du mérite. Cependant le fait qu’un seul joueur « de couleur » figurait dans l’équipe des Springboks en 1995 fut par la suite décrié, et la difficulté pour la fédération sud-africaine de rugby (SARU) à se réformer/transformer afin d’être plus représentative des différents groupes ethniques sud-africains reste un problème majeur qui a récemment nécessité la mise en place de mesures gouvernementales de discrimination positive.

In 1995, the Rugby World Cup in South Africa was the field and embodiment of reconciliation between “Whites” and “non-Whites” sought by the first demo­cratically elected “Black African” president, Nelson Mandela. The latter wanted, at the time, to make the national rugby team a symbol of unity in a country which had long been devastated by racial discrimination and the apartheid regime. The motto of the South African Rugby Federation (SARU) at this historic event was created to unite an entire country around “one team, one country”. This slogan emphasized the “non-racial” character of the Springbok team, which would no longer be selected on the basis of their racial affiliation but on the sole basis of merit. However, the fact that only one “coloured” player was in the Springbok team in 1995 was later criticized and the difficulty for the South African Rugby Federation (SARU) to reform/transform itself in order to be more representative of the different South African ethnic groups remains a burning issue which recently called for the implementation of affirmative action measures by the government.

DOI  : 10.26171/carnets-oi_0706

Au lendemain des premières élections démocratiques sud-africaines en 1994, la victoire des Springboks1 lors de la coupe de monde de rugby de juin 1995, en Afrique du Sud, fait figure de symbole de la réconciliation2 dans un pays longtemps meurtri par les lois discriminatives de l’apartheid.

Pour comprendre l’enjeu de ce triomphe et sa résonnance dans la société sud-africaine post-apartheid, il est nécessaire de connaître quelques points de l’histoire du rugby en Afrique du Sud et l’importance de la transformation de l’équipe des Springboks à l’heure actuelle.

Si le rugby représente l’un des sports les plus populaires chez les Sud-Africains3 depuis son introduction dans la colonie du Cap dans les années 1860, il a été, au cours de son histoire, synonyme d’exclusion pour les individus « non Blancs »4 qui étaient de facto discriminés sur la base de la race5 et interdits d’appartenance à la fédération principale « Blanche », la South African Rugby Board, fondée en 1889. Importé par le colonisateur britannique dans la seconde moitié du XIXe siècle et adopté par la communauté Boer et métisse ainsi qu’à des degrés divers par les populations africaines (transfert culturel), le rugby a incarné – et incarne toujours dans certaines mentalités – la fierté d’un nationalisme « Blanc » : un jeu administré et joué par la communauté « Blanche » sud-africaine, à l’abri de toute intégration d’individus « non Blancs ». Ces derniers n’auraient, selon des stéréotypes de race et de classe persistants6, jamais trouvé un intérêt quelconque à pratiquer ce sport conçu et imaginé dans les publics schools anglaises pour l’élite de la nation britannique. Qui plus est, avant même le bouleversement politique de 1948 et l’établissement d’un régime coercitif prônant le « développement séparé »7 des groupes raciaux8, les sports étaient organisés selon les colour lines. Pour une même discipline, il était donc courant que plusieurs organisations/fédérations orchestrent les différentes équipes et championnats en fonction des groupes de population auxquels appartenaient les joueurs et leurs clubs. Ainsi, il existait, par exemple pour le rugby, plusieurs fédérations telles que la South African Rugby Board (pour les joueurs « Blancs » - notamment responsable de la seule équipe nationale reconnue : les Springboks), la South African Rugby Union (pour les Coloured / les « Métis »), la South African Bantu Rugby Board (pour les personnes africaines regroupés dans les territoires (bantustans) délimités par les architectes de l’apartheid9), etc. Suite à l’effondrement du régime de l’apartheid, la nécessité de construire une « nouvelle Afrique du Sud » a été associée à la volonté de Mandela et de son parti politique, l’ANC, de « reconstruire »10 le pays sur des bases égalitaires et équitables, tout en réparant les « désavantages historiques »11 par le biais de mesures de discriminations positives12.

Toutes les fédérations nationales de rugby sud-africaines furent donc réunies13 au sein d’une seule et même fédération – portant le nom de South African Rugby Football Union (SARFU) – le 23 mars 1992, avec deux présidents à sa tête (un « Blanc », Dr Danie Craven et un « Métis », Ebrahim Patel)14 avec la promesse de chaque camp d’œuvrer à la transformation de ce sport. Parmi les nombreux défis qui se posèrent à cette nouvelle institution désormais qualifiée de non-raciale : celui de l’ouverture à tous les joueurs indépendamment de leur couleur de peau et surtout celui de représenter, à travers l’équipe nationale de rugby à XV, la nation arc-en-ciel (« rainbow nation ») et sa diversité. Si l’équipe des Springboks de 1995 ne comportait qu’un seul joueur « non Blanc », Chester Williams, son titre de champion du monde réussit à captiver l’ensemble des Sud-Africains et à devenir l’emblème de « l’unité dans la diversité »15.

Mais après l’euphorie de ce succès, le gouvernement de Mandela – notamment par le biais de son ministre du Sport et du Loisir, Steve Tshwete – prit conscience que la composition des équipes sportives nationales jouait un rôle fort, aussi emblématique que politique, dans l’unification du pays16, et ce malgré un passage en force du professionnalisme ajouté à la pression des nouveaux sponsors pour ne faire du rugby qu’un sport-spectacle parmi tant d’autres. Pour le gouvernement sud-africain il ne s’agit plus de se plier aux exigences d’une audience majoritairement blanche et des lois du marché mais plutôt d’exiger de la fédération nationale qu’elle sélectionne un nombre plus important de joueurs « non Blancs ».

Dès 1999, S. Tshwete introduisit l’idée de quota17 pour en finir avec « une injustice manifeste » et « la résistance d’une oligarchie blanche »18. Les équipes de rugby sud-africaines avaient, dès lors, le devoir d’inclure au minimum trois joueurs « de couleur » et de faire jouer au moins deux joueurs « non Blancs » à chaque match. Ce système informel et non structuré se révéla non efficient et finit par être abandonné en 2004. Entre temps, le gouvernement du successeur de Mandela, Thabo Mbeki, établit une politique de « Développement Économique Noir » (traduction littérale de Black Economic Empowerment) en 200319 dont l’objectif était d’accorder certains privilèges aux « Noirs Génériques » (Generic Blacks) – terme assez vague incluant presque20 tous les groupes de populations ayant subi des préjudices pendant l’apartheid. La discrimination positive faisait désormais partie intégrante de la politique socio-économique menée par l’ANC. La fédération sud-africaine de rugby se retrouvait donc au pied du mur : la transformation de sa structure et de sa politique de recrutement était nécessaire à sa survie21 notamment sur le plan légal. En 2006, la SARU22 demanda au Dr Willie Basson (consultant) de rédiger une Charte de la Transformation (Transformation Charter) qu’elle adopta et présenta au Ministre du Sport et du Loisir de l’époque. Il s’agissait de réformer le rugby sud-africain afin de développer ce sport de la base à l’élite : l’inclusion des personnes « non Blanches » devint cruciale car les investigations du Dr Basson montrèrent que le réservoir de joueurs « Blancs » s’amenuisait sur le long terme. Les conditions étaient donc réunies pour la nomination en 2008 du premier entraineur « non Blanc » de l’histoire des Springboks et farouche opposant aux quotas, Peter de Villiers, qui fut ironiquement « qualifié d’“affirmative action coach” » (entraineur élu grâce à la discrimination posi­tive)23. L’arrivée au pouvoir de Jacob Zuma (2009) et la prise de fonction de Fikile Mbalula au poste du Ministre du Sport et du Loisir accélérèrent la mise en place d’un système multidimensionnel permettant d’évaluer la réelle transformation du rugby sud-africain - à l’aide de feuilles de route et d’objectifs à atteindre. Un des points importants de cette nouvelle politique sportive fut d’évaluer l’inclusion de personnes « Noires Génériques » et « Noires Africaines » aussi bien parmi les joueurs qu’au sein de l’administration de la SARU. Il ne s’agissait donc plus de sélectionner uniquement des joueurs pour leurs prouesses sportives, mais il fallait également qu’un certain nombre de joueurs Noirs puissent intégrer les rangs de la fédération nationale de rugby sud‑africaine.

Dès lors, il est possible de constater qu’à la suite de la période de transition démocratique (1989-1994), l’Afrique du Sud fit face à une période plus longue de « transformation »24 politique et socio-économique (depuis 1994) qui affecta tous les secteurs y compris le secteur sportif considéré comme une des clés de voute dans la construction d’une (nouvelle) identité nationale. Ces prolégomènes étant évoqués, il s’agit maintenant d’examiner la métamorphose de la fédération sud-africaine de rugby par le levier de mesures gouvernementales originales.

Pour cela, nous reviendrons dans un premier temps sur la mise en place d’une feuille de route générique ainsi qu’un « baromètre de la transformation » évalués par un comité indépendant (l’Eminent Persons GroupEPG), puis nous analyserons les résultats produits par la soumission de la SARU à un système de quota. Enfin, nous analyserons les perspectives d’une telle politique des sports, vingt-cinq ans après l’avènement de la démocratie en Afrique du Sud.

La mise en place d’une feuille de route universelle et d’un « baromètre de la transformation » pour la métamorphose des sports sud‑africains : le cas du changement de la composition raciale de l’équipe des Springboks

Quelques dates clés

Commençons donc par mettre en lumière les processus qui ont accéléré la mise en œuvre d’une politique de sélection de joueurs et de membres des fédéra­tions nationales fondée sur leur appartenance à des groupes de populations « histori­quement désavantagées ». Nous rappelons ici que ces groupes prennent l’appellation de « Noirs Génériques » et sont eux-mêmes constitués d’anciennes entités humaines artificiellement construites pour servir la ségrégation spatiale durant l’apartheid ; sont donc aujourd’hui considérés comme « Noirs Génériques » les Coloured, les Indiens et les Africains auxquels sont ajoutés les Chinois à partir de 2008.

Après son accession à la tête du ministère du Sport et du Loisir en 2010, Fikile Mbalula convoqua, en 2011, les acteurs majeurs de la vie sportive en Afrique du Sud à une conférence (National Sport and Recreation Plan Indaba) afin de définir les bases d’un plan d’action ambitieux sur une période de neuf ans (2011-2020). Il a pour but d’aboutir à l’horizon 2020 (Vision 2020) à « la transformation de la transmission du sport et du loisir en assurant un accès équitable et l’excellence à tous les niveaux de participation tout en exploitant les contributions socio-économiques qui peuvent permettre une meilleure vie pour tous les Sud‑Africains ».25

Afin de parvenir à ce but, une charte de la transformation (Transformation Charter) fut présentée aux fédérations sportives nationales assortie d’une feuille de route comportant un certain nombre de critères permettant de mesurer leurs niveaux de mutation. Les fédérations nationales furent également invitées, à partir de 2016, à définir leurs propres paramètres de transformation (self-target Barometer) – tel que le pourcentage de personnes « Noires Génériques » qu’elles emploient pour citer un exemple – afin de montrer qu’elles sont effectivement engagées dans le processus de métamorphose du sport qu’elle coordonne sur le plan national.

Pour permettre la mise en place de ce plan d’action, le ministre nomma, en 2012, un comité indépendant, l’Eminent Persons Group (EPG), dont la mission était, dans un premier temps, d’aider les fédérations à dresser un bilan de leurs niveaux respectifs de transformation (c’est-à-dire quelles sont les mesures prises par les fédérations jusqu’au début des années 2010, ayant permis au sport qu’elle représente d’être accessible à l’ensemble de la population sud-africaine ? Quel est le pourcentage d’inclusion des « Noirs Génériques » et quelle est la proportion d’individus « Noirs Africains26 » au sein de ces fédérations ?).

Un premier audit est effectué par l’EPG en 2012-2013 pour cinq sports qui font partie d’un premier projet pilote (athlétisme, cricket, football, netball et rugby) suivi de trois audits (2013/2014, 2014/2015 et 2015/2016) qui intègrent onze autres fédérations sportives.

Dans un second temps, ce comité vérifie que les fédérations mettent en place des tableaux de bord à remplir de façon annuelle sur une durée de cinq ans (2015-2019) et évalue chaque année la réalisation de ces objectifs. Ce plan quinquennal prend le nom de Plan Stratégique de Transformation (Strategic Transformation Plan) pour la SARU.

Il est toutefois nécessaire de préciser que ce plan stratégique ne comporte pas seulement un système de quota visant à une meilleure représentativité de la démographie sud-africaine. Il s’agit davantage d’appliquer le B-BBEE (Broad-Based Black Economic Empowerment) aux fédérations sportives nationales. À ce titre, six (parfois 7) domaines sont évalués :

  1. la représentation démographique et notamment la représentation des groupes raciaux

  2. l’accès au jeu de manière équitable

  3. le développement des compétences et des capacités (des personnes « Noires Génériques »)

  4. la performance

  5. le développement du jeu associatif (au niveau communautaire) et la responsabilité sociale

  6. la gouvernance d’entreprise

  7. (l’émancipation/le développement économique)

On constate cependant que la représentation démographique est au cœur de tous les débats car elle pose la question de l’appartenance raciale, sujet extrêmement sensible pour une nation qui tente de se reconstruire sur de nouvelles bases non racistes mais au sein de laquelle persiste des communautés « racialisées »27.

Il peut être judicieux d’illustrer quelques-uns des engagements de la fédération sud-africaine de rugby concernant les domaines autres que la représentation démo­graphique. Citons deux initiatives de la SARU à partir de 2012-2013. Un nouveau tournoi sponsorisé (Cell C Community Cup) pour les clubs nationaux est organisé à partir de février 201328 dans le but de faire revivre le rugby associatif, notamment chez les « populations désavantagées ». Un partenariat est également signé en 2013 entre la SARU et la SARLA (South African Rugby Legends Association) dans l’objectif de promouvoir le rugby à tous les niveaux, en particulier scolaire, en utilisant les compétences et l’aura de joueurs/entraineurs retraités lors de manifestations spor­tives afin de présenter ce sport au plus grand nombre d’écoliers à travers le pays.

À la suite de la conférence de 2011, les mesures prises par la SARU et le ministère du Sport pour faire avancer le dossier de la transformation sont nombreuses. Les premiers chiffres fournis par l’EPG à l’issue d’un premier audit (2013) aboutissent à l’attribution à la SARU d’un score déjà satisfaisant (plus de 70 points) en matière de changement. Il s’agit alors pour le gouvernement sud-africain d’aller plus loin et plus vite. L’objectif annoncé à l’issue du plan quinquennal pour la SARU pour la seule représentation démographique est d’inclure au minimum 50 % de joueurs « Noirs Génériques » bien qu’ils ne constituent que 18 % de la composition des Springboks en 2014.

Comment fonctionne ce baromètre de transformation ?

En premier lieu, notons que selon le Ministère du Sport et du Loisir, l’intro­duction d’un baromètre de transformation permet un changement de politique sportive, car, d’après les propos d’un membre de l’EPG, l’adoption de la Charte de la Transformation « n’est plus une action politiquement motivée, mais entérinée par les fédérations sportives. Elles ont accepté qu’elles devaient changer pour survivre et pour rester compétitives »29. L’EPG, censé être un groupe indépendant du Ministère, se retrouve (md) responsable de « nommer, blâmer et couvrir de honte »30 les fédérations nationales qui ne se conformeraient pas aux objectifs qu’elles se seront préalablement fixés.

Par ailleurs, cette double motivation (survie et compétitivité) permet la conclusion d’un accord tacite entre le Ministère sud-africain en charge du Sport et du Loisir, la SARU et le SASCOC31 en 2014-2015 (Memorandum of Agreement) qui oblige la fédération à présenter les objectifs qu’elle détermine elle-même à partir de certains critères proposés par l’EPG. Elle se doit ainsi de justifier ses résultats en matière de transformation par le biais de délégations convoquées devant le Parlement.

La fédération reconnaît également la possibilité d’encourir une ou plusieurs sanctions dans le cas où ses objectifs ne sont pas atteints chaque année. Les possibles pénalités sont au nombre de trois :

  1. suspension ou retrait des fonds gouvernementaux

  2. révocation du pouvoir de participation à un tournoi international ou d’accueil d’un événement sportif majeur sur le sol sud-africain

  3. retrait de l’attribution des couleurs nationales et/ou l’arrêt de la re­connaissance d’une organisation en tant que fédération nationale selon la loi concernant les sports nationaux (National Sports Act, 1998).

Nous noterons toutefois que ces pénalités ne sont applicables qu’au niveau national (élite) et ne concernent pas les quatorze fédérations provinciales de rugby même si elles sont accompagnées dans une démarche de transformation à leur niveau, avec audit et feuilles de route proposés par la SARU.

La politique sportive sud-africaine négocie ainsi à partir de 2011 un virage assez radical en matière de transformation. Elle demande à certaines fédérations, dont le rugby, de produire des résultats sur une période de cinq ans en usant de menaces et pressions gouvernementales.

Le Plan Stratégique de Transformation à l’heure du bilan

Objectifs vs résultats

Que pouvons-nous dire de cette politique sportive et de ses effets sur la SARU en matière de réforme économique et sociale ? La stratégie quinquennale adoptée par la fédération de rugby porte-t-elle ses fruits ? Cependant, la question centrale, qui fait la une des médias sud-africains et étrangers, concerne l’évolution de la composition raciale des Springboks entre 2015 et 2019 ? Car il est utile de préciser que l’équipe nationale fait figure de laboratoire en ce qui concerne la transformation sur le long terme du rugby sud-africain à tous les niveaux (universitaire, provincial,…).

Dans un premier temps, rappelons les objectifs32 que la SARU s’était fixée pour les cinq années du Plan Stratégique de Transformation. La proportion à atteindre en 2015 était de 30 % de joueurs « Noirs Génériques » dans l’équipe des Springboks avec une augmentation de 5 % de ce pourcentage par an jusqu’à atteindre en 2019 une proportion de 50 % de joueurs « Blancs » et 50 % de joueurs « Noirs » au sein de l’équipe nationale de rugby.

Le Diagramme n° 1 montre les objectifs à atteindre pour la répartition démographique (« Blancs » et « Noirs Génériques ») au sein de l’équipe des Springboks entre 2015 et 2019

Le Diagramme n° 1 montre les objectifs à atteindre pour la répartition démographique (« Blancs » et « Noirs Génériques ») au sein de l’équipe des Springboks entre 2015 et 2019

Le Diagramme n° 2 examine les différences entre le pourcentage à atteindre et le pourcentage réel de joueurs « Noirs Génériques » au sein des Springboks entre 2014 et 2018

Le Diagramme n° 2 examine les différences entre le pourcentage à atteindre et le pourcentage réel de joueurs « Noirs Génériques » au sein des Springboks entre 2014 et 2018

En analysant les chiffres fournis par la SARU et l’EPG en 2019, nous pouvons, en effet, constater une nette augmentation du nombre de joueurs « non Blancs » au sein des Springboks (+21 % entre 2014 et 2018) avec une évolution qui respecte plus ou moins les objectifs fixés (par an) jusqu’en 2018. Nous n’avons pas encore les chiffres exacts pour l’année en cours (2019) mais l’équipe sud-africaine de rugby (groupe de 31 joueurs) qui devait partir pour la coupe du monde de rugby en 2019 aurait dû comporter au minimum 50 % de joueurs « non Blancs ». Ce chiffre n’a pas été atteint : l’actuel entraineur principal, Rassie Erasmus a sélectionné environ 39 % de joueurs « non Blancs » pour constituer son équipe de Springboks en partance pour le tournoi mondial au Japon.

Évènements symboliques vs processus au long terme

R. Erasmus a pourtant été loué par les médias et la SARU pour avoir nommé le premier capitaine « Noir » (Siya Kolisi) de l’histoire des Springboks en 2018. Le symbolisme de ce choix est considérable, et certains observateurs y voient le dé­but d’un réel changement d’ère au sein de la fédération de rugby. Selon le propre rapport annuel 2014 de cette dernière, la « croyance populaire » voudrait que « la SARU n’a pas de plan de transformation et n’est pas engagée dans un processus de transformation ».33 La sélection de Kolisi abonde dans le sens contraire de ces préjugés en témoignant d’un long chemin parcouru depuis la mise en place du Plan Stratégique de Transformation.

De plus, la sélection d’une équipe de rugby sud-africaine composée à 53 % de joueurs « non Blancs » lors du premier match des Springboks pour l’édition 2019 du prestigieux Rugby Championship34 a été perçue comme une réalisation concrète des objectifs annoncés par la SARU en ce qui concerne le paramètre de représentation démographique, bien que cet événement soit de l’ordre du ponctuel.

Peu après ce fait marquant, le président de la SARU déclarait en août 2019 que le sélectionneur des Springboks avait « atteint les objectifs en matière de trans­formation ». Il ajouta qu’« aucune pression externe ou interférence »35 ne viendrait troubler les choix de joueurs effectués par Rassie Erasmus pour la coupe du monde 2019.

Ces éléments confortent la position de la SARU par rapport à l’enjeu de la transformation. Ainsi, avant même d’entamer leur Plan Stratégique de Transformation, elle refusait de réduire la transformation à un « nouveau système de quota »36 en insistant sur le fait que pour changer la représentation démographique des Springboks, il y avait nécessité de réformer le rugby sud-africain à toutes les échelles, du rugby scolaire/universitaire au rugby provincial en passant par le rugby associatif. Ce processus devait donc nécessairement s’inscrire sur le long terme.

Alors que s’achève cette année le Plan Stratégique de Transformation sur un bilan en demi-teinte, la SARU a déjà publié son Plan Stratégique de Transformation et Développement (Strategic Transformation Development Plan) s’étalant sur les onze prochaines années (2019-2030) avec le souhait d’étendre le défi de la transformation aux fédérations provinciales.

Imposer un paramètre de représentation démographique au rugby sud‑africain : défis et perspectives

La pérennité du système des quotas

Parmi les critiques les plus fréquentes formulées à l’encontre du système des quotas se trouve la question de la durée du processus de transformation. Autrement dit, à quel moment peut-on considérer que la transformation est achevée ? Nous avons vu précédemment que le plan d’action instauré en 2011 par le Ministère du Sport et du Loisir sud-africain prévoyait un projet pilote sur le court terme (2015-2019). Or, nous avons également constaté qu’avant la fin de ce plan quinquennal, la SARU a opté pour la continuité d’un Plan Stratégique qui s’étale sur les onze prochaines années. De plus, la présentation de la Stratégie de Transformation en 2016 par l’EPG peut être comparée à un château de cartes avec une base à forte coloration législative. En effet, si l’on retire l’arsenal de lois relatives à la politique de discrimination positive (Economic Empowerment, Preferential Procurement, Employment Equity), il semble peu probable d’atteindre l’objectif d’une représentation démographique à toutes les échelles : du sport de masse au sport de haut niveau.

Toutefois, le schéma établi par l’EPG propose un plan d’action idéal qui part dans les deux sens, de la base à l’élite, et vice versa. Selon les chercheurs Torres et McLaughlin37 « le sport de haut niveau doit soutenir le sport de masse de façon dynamique et sérieuse ». Précisons que des actions ont été menées par la fédération sud-africaine de rugby afin de faire connaître les pratiques liées au ballon ovale à des élèves d’Afrique du Sud qui n’avaient jamais joué à ce sport. Par exemple, en 2014, « 24 000 écoliers sud-africains scolarisés en primaire furent introduits au rugby pour la première fois »38. Mais dans un pays qui compte, en 2014, plus de 18 millions enfants (âgés de moins de 18 ans), cette mesure peut paraître minime, même si la SARU affirmait, la même année, être bien consciente des statistiques du pays et de la nécessité pour le rugby sud-africain de se transformer. On peut ainsi lire dans le rapport annuel de la fédération en 2014 que « la majorité des écoles et clubs sont noirs ; la majorité des Sud-Africains se décrivant eux-mêmes comme fans de rugby sont noirs et 84 % de notre population âgée de moins de 18 ans est noire ; ce sont là des statistiques que notre sport ne peut ignorer qu’à ses risques et périls »39.

Cependant, le seul moyen de savoir si la politique sportive nationale concernant le rugby a été réellement efficace serait d’évaluer la transformation de l’équipe des Springboks pour une même période de cinq ans sans qu’il y ait de quotas imposés.

Car le système des quotas, qu’il soit imposé au rugby sud-africain ou que la SARU se l’impose à elle-même, reste une solution artificielle. Il est donc difficile d’évaluer le changement réel en matière de recrutement des joueurs et des cadres administratifs « non Blancs » lorsqu’une fédération est soumise à une politique sportive nationale contraignante.

Le système des quotas divise la nation sud‑africaine

Même si la SARU ne veut pas centrer le débat de la transformation, pour les sports en Afrique du Sud en général et pour le rugby sud-africain en particulier, sur l’unique thème de la représentation démographique, la question des quotas reste un enjeu problématique tant en Afrique du Sud qu’au niveau international dans la mesure où elle divise.

Le sélectionneur des All Blacks en 2019, Steve Hansen, fut fustigé par les anciens membres d’organisations sud-africaines contre le racisme sportif40, lorsqu’il déclara en 2018 que l’équipe des Springboks constituait, à sa connaissance, « la seule équipe (…) qui ne sélectionne pas sa meilleure équipe »41. En d’autres termes, l’entraineur néo-zélandais relançait la discussion sur la dichotomie qui existe entre la sélection par mérite et la sélection par le biais des quotas.

Or si le système de sélection sud-africain n’est pas publiquement rejeté par la fédération internationale de rugby (World Rugby), il va à l’encontre des statuts entérinés par cette dernière. World Rugby se donne ainsi, parmi ses objectifs, la mission de « prévenir la discrimination sous quelque forme que ce soit, à l’encontre d’un pays, d’une personne privée ou d’un groupe de personnes (…) en raison de l’âge, du genre, de la situation matrimoniale, de la maternité, du handicap, de la race (incluant la couleur, la nationalité, l’origine ethnique ou nationale), de la religion ou croyance, du sexe ou de l’orientation sexuelle ou n’importe quelle autre raison »42.

Il y existerait donc une exception dans le cas du rugby sud-africain qui ne respecte pas cette clause du règlement de World Rugby.

De plus, une récente étude publiée par l’Institut sud-africain des Relations Raciales43 (South African Institute for Race Relations), parue en 2019, postule que plus de 83 % de la population sud-africaine serait en faveur de la sélection par mérite (et non par quotas).

Tableau n° 1 représentant le résultat du sondage effectué par le think tank basé au Cap (South African Institute for Race Relations) auprès d’un échantillon de la population sud-africaine qui devait donner son avis par rapport à l’affirmation suivante : « les équipes sportives doivent être sélectionnées par mérite, et non par quotas »

Total

Total Noir

Coloured/Métis

Indien

Blanc

Oui   

83 %

82 %

81 %

75 %

96 %

Non

15 %

17 %

16 %

25 %

3 %

Cette prise de position est partagée par l’actuel capitaine des Springboks qui a avancé en janvier 2019 que Mandela « n’aurait pas approuvé ces quotas (…) »44. Si Siya Kolisi avait alors également déclaré que pour un joueur « représenter l’Afrique du Sud est difficile car les gens veulent les résultats et la transformation »45, il est aujourd’hui l’exemple même que ce double objectif est réalisable puisque l’actuelle équipe des Springboks a remporté la coupe du monde de rugby en novembre 2019.

Par opposition, l’ancien Springbok et champion du monde Bryan Habana a souligné le côté positif des quotas en se réjouissant qu’« il y a plein de visages de couleurs (différentes) dans l’équipe des Springboks. Est-ce-que ces visages seraient là si certaines politiques de transformation n’étaient pas en place ? Cela est difficile à dire. (…) Est-ce que nous y sommes ? Le rugby a accompli beaucoup de progrès à plusieurs niveaux mais nous luttons contre de nombreuses choses différentes – l’exode des joueurs chaque année, de manière constante, et un combat contre une histoire qu’aucun pays n’a à confronter. Beaucoup de progrès ont été accomplis ; je serai sans doute le premier à dire que je pense qu’un progrès important est encore à réaliser (…) »46.

Conclusion

Le rugby sud-africain se trouve finalement dans une position toujours inter­médiaire, entre sa volonté de mieux représenter la nation arc-en-ciel et les carcans numériques imposés par un agenda politique avide de voir se réaliser au plus vite un parfait équilibre entre individus « Blanc » et « non Blancs » au sein de la SARU. Cet idéal à atteindre est troublé par le fait que le système des quotas divise les Sud-Africains alors que son objectif même est de les rassembler dans une société équitable.

Nous avons également constaté que le poids du passé de l’Afrique du Sud joue un rôle indéniable dans l’évaluation du processus de transformation entamé par la SARU dans la mesure où la colonisation et l’apartheid ont produit des stéréotypes liés à la race et aux classes ainsi que des inégalités sociales qu’il est difficile de combler en seulement vingt-cinq ans. Dans le contexte sud-africain, certaines mesures de discrimination positive prises par les gouvernements de l’ANC qui se sont succédés au pouvoir depuis 1994, ont effectivement permis de briser un plafond de verre qui a su résister à la transition démocratique. La composition raciale de l’équipe des Springboks 2019 en est l’exemple phare.

L’accession au titre de champion du monde pour l’actuelle équipe de rugby sud-africain, menée par le premier capitaine « non Blanc » de l’histoire des Springboks, a pris le sens d’un succès politique en faveur de la détermination gouvernementale à accélérer la transformation des sports sud-africains. Cela concrétise un pari auda­cieux : celui de démontrer que le système de quota sud-africain n’est pas un frein à la compétitivité d’une équipe sportive lorsque celle-ci est engagée dans un processus de mutation identitaire.

Cette victoire historique des Springboks lors de la coupe du monde 2019 a permis à une nation de croire à nouveau au slogan du tournoi mondial de 1995 « une équipe, un pays » transformé pour l’occasion par la fédération sud-africaine de rugby par l’expression « stronger together »47 (« l’union fait la force » ou « plus forts ensemble »). Pour de nombreux Sud-Africains, une ère nouvelle semble donc se profiler pour le rugby sud-africain, car « en 1995 et 2007, l’emblème des Springboks était encore synonyme du vieux régime. Mais aujourd’hui la boucle est bouclée »48.

Si l’on considère le chemin sinueux parcouru par les Springboks depuis l’avè­nement de la démocratie en Afrique du Sud et la rapide métamorphose qu’elle a subie concernant sa représentation démographique, il est possible de penser qu’une période de transition s’achève de manière artificielle pour cette équipe. Dans cette perspective, il sera intéressant de voir si, dans les années à venir, la SARU sera capable de poursuivre son objectif de transformation sans la contrainte de la politique des quotas.

1 Surnom donné à l’équipe nationale de rugby sud-africaine depuis 1906.

2 Plusieurs articles, fictions et un film traitent de ce moment fort de l’histoire de l’Afrique du Sud post-apartheid. Nous citerons à titre d’exemple

3 Voir le site internet de la fédération de rugby sud-africaine (SA Rugby) : “After soccer, rugby is the most popular sport in South Africa with a

4 Dès la période coloniale, il existe un système de séparation entre individus « Blancs » et « non Blancs ». Cette dichotomie s’accentue avec la mise

5 L’apartheid reconnait l’existence de différents groupes raciaux. Nous noterons au passage qu’il semble inapproprié de remplacer le terme race par le

6 Voir à ce sujet, A. Odendaal, « “The thing that is not round” the untold story of black rugby in South Africa », in A. Grundlingh (et al.), Beyond

7 Définition du terme Afrikaans apartheid.

8 Classification imposée par le gouvernement à partir de 1950 comme précisé ci-dessus.

9 Les populations bantoues sont unies d’un point de vue linguistique par plusieurs langues proches les unes des autres (langues bantoues) présentes en

10 Le Programme de Reconstruction et de Développement (Reconstruction and Development Programme) est le nom donné à la politique socio-économique du

11 La Constitution de la République d’Afrique du Sud de 1996 définit un « indivi­du historiquement désavantagé » (Historically Disavantaged Indivual)

12 Voir notamment la section 9 de la Constitution de la République d’Afrique du Sud de 1996.

13 Voir Jean-Claude Grivot, « La mue des Springboks », l’Humanité, 1er mars 1991, et la chro­nologie de l’histoire du rugby sud-africain proposée par

14 Respectivement président des anciennes SARB et SARU.

15 Traduit de l’anglais « Unity in diversity », cette expression vient d’une langue khoisan (Ixam) et elle est popularisée par Nelson Mandela dans ses

16 Voir Julien Migozzi, « Le rugby en Afrique du Sud face au défi de transformation : jeu de pouvoir, outil de développement et force symbolique »

17 Voir Godfrey Mwakikagile, Africa and the West, New-York, Nova Science Publishers, 2000, p. 182.

18 « Moment of unity has been lost », Mail and Guardian, 31 octobre 1997.

19 Cet arsenal de lois est critiqué car il profite finalement à peu d’individus en situation de précarité et est remplacé en 2007 par le B-BBEE, le

20 À l’exclusion des « Chinois » car un certain nombre d’entre eux étaient considérés, pendant l’aparthied, comme « Blancs honoraires » et jouissaient

21 Voir le résumé de la réunion parlementaire : Rugby SA Progress Report, PE Rugby Task Team, Department Annual Report, 19 février 2007. https://pmg.

22 En 2005, la SARFU est renommée South African Rugby Union (SARU), à ne pas confondre à la fédération non-raciale qui porte le même nom pendant l’

23 Op. cit., Migozzi, 2010.

24 Voir Thierry Vircoulon, « De la transition à la transformation : comprendre l’Afrique du Sud démocratique », Journal des africanistes, 76-2, 2006

25 Voir le plan national pour le Sport et le Loisir : National Sport and Recreation Plan Indaba 2011, URL : https://www.gov.za/sites/default/files/

26 Il est utile de préciser que cette catégorie fit son apparition dans le recensement national de 2011.

27 Voir à propos de ce terme, Didier Fassin, « 6. Ni race, ni racisme. Ce que racialiser veut dire », dans : Didier Fassin éd., Les nouvelles

28 Voir le rapport annuel de la SARU de 2012, p. 7.

29 Voir le rapport annuel 2014-2015 du Ministère du Sport et du Loisir sud-africain. URL : https://www.srsa.gov.za/sites/default/files/Annual%20Report

30 Compte rendu parlementaire en date du 20 mai 2015, voir URL : https://pmg.org.za/hansard/23061/.

31 Acronyme de South African Sports Confederation and Olympic Committee (confédération et comité olympique des sports sud-africains).

32 Les diagrammes ci-dessous sont établis par la SARU. Voir le Strategic Transformation Development Plan 2030, p. 14. Ces éléments sont disponibles

33 Voir le rapport annuel de la SARU de 2014, p. 96.

34 Il s’agit d’une compétition annuelle qui remplace le Tri-Nations (Afrique du Sud, Australie et Nouvelle-Zélande) depuis 2012. Les quatre

35 Voir « Rassie meets transformation targets », SA Rugby Mag, 16 août 2019.

36 Op. cit., rapport annuel de la SARU de 2014, p. 96.

37 Richard Bailey, Talbot Margaret (ed.), Elite Sport and Sport-for-All: Bridging the Two Cultures?, New York, Routledge, 2015, p. 2.

38 Rapport annuel de la SARU de 2014, p. 9.

39 Ibid., p. 9.

40 Voir la réponse écrite des membres du SARU SACOS Legends à Steve Hansen : « SARU SACOS hit back at Hansen », SA Rugby Mag, 26 septembre 2018.

41 « Hansen questioned ‘quota system’ », SA Rugby Mag, 19 septembre 2018.

42 Voir statut n° 3 de World Rugby. URL : https://www.world.rugby/handbook/bye-laws/bye-law-3.

43 Anthea Jeffrey, The state of Race Relations in SA 2019, Institute for Race Relations, 13 juin 2019. URL : https://www.politicsweb.co.za/documents/

44 « Siya Kolisi : "Je pense que Mandela n’aurait pas approuvé les quotas" », Le Figaro, 8 janvier 2019.

45 Craig Ray, « Nelson Mandela would not have supported quotas », Times, 7 janvier 2019.

46 Hugh Godwin, « Bryan Habana: “If Siya Kolisi can lead Springboks to the Rugby World Cup it will be so positive” », Inews, 20 septembre 2019.

47 Campagne menée par la SARU à partir de juillet 2019 pour rallier les supporters des Springboks autour de cette devise. Voir « Springboks – South

48 « En Afrique du Sud, la victoire des Springboks “ravive la magie” de Mandela », Les échos, 2 novembre 2019.

Bailey R., Talbot M. (ed.), Elite Sport and Sport-for-All: Bridging the Two Cultures?, New York, Routledge, 2015.

Mwakikagile G., Africa and the West, New-York, Nova Science Publishers, 2000.

Odendaal A., « ‘The thing that is not round’ the untold story of black rugby in South Africa », in A. Grundlingh (et al.), Beyond the tryline, Rugby and South African society, Randburg, Ravan Press,1995, p. 24.

Articles académiques

Fassin D., « 6. Ni race, ni racisme. Ce que racialiser veut dire », dans : Didier Fassin éd., Les nouvelles frontières de la société française. Paris, La Découverte, « Poche / Sciences humaines et sociales », 2012, p. 147-172. DOI : https://doi.org/10.3917/dec.fassi.2012.03.0147. URL : https://www.cairn.info/les-nouvelles-frontieres-de-la-societe-francaise--9782707174536-page-147.htm.

Migozzi J., « Le rugby en Afrique du Sud face au défi de transformation : jeu de pouvoir, outil de développement et force symbolique », Les Cahiers d’Outre-Mer n° 250, Avril-Juin, 2010, p. 253-274.

Vircoulon T., « De la transition à la transformation : comprendre l’Afrique du Sud démocratique », Journal des africanistes, 76-2, 2006, p. 155-165.

Articles de presse

Godwin H., « Bryan Habana: “If Siya Kolisi can lead Springboks to the Rugby World Cup it will be so positive” », Inews, 20 septembre 2019.

Grivot J-C., « La mue des Springboks », l’Humanité, 1er mars 1991.

Pflanz M., « Chinese South Africans classified as black », The Telegraph, 18 juin 2008.

Ray C., « Nelson Mandela would not have supported quotas », Times, 7 janvier 2019.

« En Afrique du Sud, la victoire des Springboks “ravive la magie” de Mandela », Les échos, 2 novembre 2019.

« Hansen questioned “quota system” », SA Rugby Mag, 19 septembre 2018.

« Moment of unity has been lost », Mail and Guardian, 31 octobre 1997.

« “Rassie meets transformation targets” », SA Rugby Mag, 16 août 2019.

« SARU SACOS hit back at Hansen », SA Rugby Mag, 26 septembre 2018.

« Siya Kolisi : “Je pense que Mandela n’aurait pas approuvé les quotas” », Le Figaro, 8 janvier 2019.

1 Surnom donné à l’équipe nationale de rugby sud-africaine depuis 1906.

2 Plusieurs articles, fictions et un film traitent de ce moment fort de l’histoire de l’Afrique du Sud post-apartheid. Nous citerons à titre d’exemple l’article de Patrice Galand, Le rugby sud-africain : le « sport de l’homme blanc » ambassadeur d’une nation multiraciale ? Politique Africaine n° 61, Paris, Karthala, mars 1996. p. 139. Voir également le film Invictus de Clint Eastwood (2009) et le livre de John Carlin, Playing the enemy, Nelson Mandela and the game that made a nation, Londres, Atlantic Books, 2009.

3 Voir le site internet de la fédération de rugby sud-africaine (SA Rugby) : “After soccer, rugby is the most popular sport in South Africa with a following of close to 10 million in a population of close to 50 million.” (Après le football, le rugby est le sport le plus populaire en Afrique du Sud avec un nombre de supporters proche de 10 millions pour une population de près de 50 millions d’habitants.) URL : https://www.sarugby.co.za/en/pages/about-us.

4 Dès la période coloniale, il existe un système de séparation entre individus « Blancs » et « non Blancs ». Cette dichotomie s’accentue avec la mise en place de l’apartheid, et de façon plus précise à partir de 1950, avec une classification systématique des personnes en quatre groupes raciaux : « Blancs », « Noirs », « Métis/Coloured » et « Asiatiques » (cf. Group Areas Act n° 41 et Population Registration Act de l’année 1950).

5 L’apartheid reconnait l’existence de différents groupes raciaux. Nous noterons au passage qu’il semble inapproprié de remplacer le terme race par le mot ethnique en ce qui concerne la période post-apartheid tant l’histoire de l’Afrique du Sud est marquée par le sceau de la division raciale dont les vestiges sont aujourd’hui encore visibles notamment sur le plan spatial. De plus, le mot anglais race est utilisé dans la langue courante. Il permet par exemple de désigner un groupe de personnes ayant des caractéristiques communes (i.e. l’origine pour les Indiens) dans les statistiques nationales de certains pays anglophones pour les besoins de recensements nationaux. La question raciale est ainsi un thème de recherche pour les sciences sociales actuelles.

6 Voir à ce sujet, A. Odendaal, « “The thing that is not round” the untold story of black rugby in South Africa », in A. Grundlingh (et al.), Beyond the tryline, Rugby and South African society, Randburg, Ravan Press, 1995, p. 24.

7 Définition du terme Afrikaans apartheid.

8 Classification imposée par le gouvernement à partir de 1950 comme précisé ci-dessus.

9 Les populations bantoues sont unies d’un point de vue linguistique par plusieurs langues proches les unes des autres (langues bantoues) présentes en Afrique de l’Ouest et en Afrique australe. Pendant l’apartheid, les « bantoustans » sont des entités géographiques et politiques en Afrique du Sud conçues par les dirigeants du Parti National pour être le lieu de résidence des populations africaines afin que celles-ci ne cohabitent pas, sur le plan spatial, avec les populations blanches et métisses.

10 Le Programme de Reconstruction et de Développement (Reconstruction and Development Programme) est le nom donné à la politique socio-économique du gouvernement de Mandela. Elle a pour objectif de réduire la pauvreté et de répondre aux inégalités creusées par plus de quatre décennies de discriminations raciales dont a souffert la majeure partie de la population sud-africaine pendant l’apartheid.

11 La Constitution de la République d’Afrique du Sud de 1996 définit un « indivi­du historiquement désavantagé » (Historically Disavantaged Indivual) comme étant une personne qui n’avait pas le droit de vote aux élections nationales avant 1994 mais qui est de nationalité sud-africaine avant 1994.

12 Voir notamment la section 9 de la Constitution de la République d’Afrique du Sud de 1996.

13 Voir Jean-Claude Grivot, « La mue des Springboks », l’Humanité, 1er mars 1991, et la chro­nologie de l’histoire du rugby sud-africain proposée par la South African History Online. URL : https://www.sahistory.org.za/article/timeline-history-rugby-south-africa.

14 Respectivement président des anciennes SARB et SARU.

15 Traduit de l’anglais « Unity in diversity », cette expression vient d’une langue khoisan (Ixam) et elle est popularisée par Nelson Mandela dans ses discours en tant que chef de l’État sud-africain (i.e. allocution lors d’un diner à Jakarta en 1997). Elle est la devise nationale de la République d’Afrique du Sud depuis les années 2000.

16 Voir Julien Migozzi, « Le rugby en Afrique du Sud face au défi de transformation : jeu de pouvoir, outil de développement et force symbolique », Les Cahiers d’Outre-Mer n° 250, Avril-Juin, 2010, p. 253-274. Le slogan de l’équipe de 1995 était « one team, one country » (« une équipe, un pays »).

17 Voir Godfrey Mwakikagile, Africa and the West, New-York, Nova Science Publishers, 2000, p. 182.

18 « Moment of unity has been lost », Mail and Guardian, 31 octobre 1997.

19 Cet arsenal de lois est critiqué car il profite finalement à peu d’individus en situation de précarité et est remplacé en 2007 par le B-BBEE, le Broad-Based Black Economic Empowerment que nous traduisons littéralement par « développement économique des Noirs à grande échelle ».

20 À l’exclusion des « Chinois » car un certain nombre d’entre eux étaient considérés, pendant l’aparthied, comme « Blancs honoraires » et jouissaient donc des mêmes droits que la population « Blanche ». Les « Chinois » sont intégrés au groupe des « Noirs Génériques » à partir de 2008 après une longue bataille judiciaire afin de bénéficier des avantages de la politique de discrimination positive. Voir Mike Pflanz, « Chinese South Africans classified as black », The Telegraph, 18 juin 2008.

21 Voir le résumé de la réunion parlementaire : Rugby SA Progress Report, PE Rugby Task Team, Department Annual Report, 19 février 2007. https://pmg.org.za/committee-meeting/7736/.

22 En 2005, la SARFU est renommée South African Rugby Union (SARU), à ne pas confondre à la fédération non-raciale qui porte le même nom pendant l’apartheid.

23 Op. cit., Migozzi, 2010.

24 Voir Thierry Vircoulon, « De la transition à la transformation : comprendre l’Afrique du Sud démocratique », Journal des africanistes, 76-2, 2006, p. 155-165.

25 Voir le plan national pour le Sport et le Loisir : National Sport and Recreation Plan Indaba 2011, URL : https://www.gov.za/sites/default/files/gcis_document/201409/nasional-sport-and-recretion-plan-draft-200.pdf.

26 Il est utile de préciser que cette catégorie fit son apparition dans le recensement national de 2011.

27 Voir à propos de ce terme, Didier Fassin, « 6. Ni race, ni racisme. Ce que racialiser veut dire », dans : Didier Fassin éd., Les nouvelles frontières de la société française. Paris, La Découverte, « Poche / Sciences humaines et sociales », 2012, p. 147-172. DOI : 10.3917/dec.fassi.2012.03.0147. URL : https://www.cairn.info/les-nouvelles-frontieres-de-la-societe-francaise--9782707174536-page-147.htm.

28 Voir le rapport annuel de la SARU de 2012, p. 7.

29 Voir le rapport annuel 2014-2015 du Ministère du Sport et du Loisir sud-africain. URL : https://www.srsa.gov.za/sites/default/files/Annual%20Report%202014-15%20FINAL.pdf.

30 Compte rendu parlementaire en date du 20 mai 2015, voir URL : https://pmg.org.za/hansard/23061/.

31 Acronyme de South African Sports Confederation and Olympic Committee (confédération et comité olympique des sports sud-africains).

32 Les diagrammes ci-dessous sont établis par la SARU. Voir le Strategic Transformation Development Plan 2030, p. 14. Ces éléments sont disponibles sur le site internet de la SARU.

33 Voir le rapport annuel de la SARU de 2014, p. 96.

34 Il s’agit d’une compétition annuelle qui remplace le Tri-Nations (Afrique du Sud, Australie et Nouvelle-Zélande) depuis 2012. Les quatre principales fédérations de rugby de l’hémi­sphère sud : l’Afrique du Sud, l’Australie, la Nouvelle-Zélande et l’Argentine prennent part à ce tournoi pendant l’hiver austral.

35 Voir « Rassie meets transformation targets », SA Rugby Mag, 16 août 2019.

36 Op. cit., rapport annuel de la SARU de 2014, p. 96.

37 Richard Bailey, Talbot Margaret (ed.), Elite Sport and Sport-for-All: Bridging the Two Cultures?, New York, Routledge, 2015, p. 2.

38 Rapport annuel de la SARU de 2014, p. 9.

39 Ibid., p. 9.

40 Voir la réponse écrite des membres du SARU SACOS Legends à Steve Hansen : « SARU SACOS hit back at Hansen », SA Rugby Mag, 26 septembre 2018.

41 « Hansen questioned ‘quota system’ », SA Rugby Mag, 19 septembre 2018.

42 Voir statut n° 3 de World Rugby. URL : https://www.world.rugby/handbook/bye-laws/bye-law-3.

43 Anthea Jeffrey, The state of Race Relations in SA 2019, Institute for Race Relations, 13 juin 2019. URL : https://www.politicsweb.co.za/documents/the-state-of-race-relations-in-sa-2019—irr.

44 « Siya Kolisi : "Je pense que Mandela n’aurait pas approuvé les quotas" », Le Figaro, 8 janvier 2019.

45 Craig Ray, « Nelson Mandela would not have supported quotas », Times, 7 janvier 2019.

46 Hugh Godwin, « Bryan Habana: “If Siya Kolisi can lead Springboks to the Rugby World Cup it will be so positive” », Inews, 20 septembre 2019.

47 Campagne menée par la SARU à partir de juillet 2019 pour rallier les supporters des Springboks autour de cette devise. Voir « Springboks – South Africa, let’s be #StrongerTogether », 11 juillet 2019. URL : https://www.springboks.rugby/en/articles/2019/07/11/Stronger-Together.

48 « En Afrique du Sud, la victoire des Springboks “ravive la magie” de Mandela », Les échos, 2 novembre 2019.

Le Diagramme n° 1 montre les objectifs à atteindre pour la répartition démographique (« Blancs » et « Noirs Génériques ») au sein de l’équipe des Springboks entre 2015 et 2019

Le Diagramme n° 1 montre les objectifs à atteindre pour la répartition démographique (« Blancs » et « Noirs Génériques ») au sein de l’équipe des Springboks entre 2015 et 2019

Le Diagramme n° 2 examine les différences entre le pourcentage à atteindre et le pourcentage réel de joueurs « Noirs Génériques » au sein des Springboks entre 2014 et 2018

Le Diagramme n° 2 examine les différences entre le pourcentage à atteindre et le pourcentage réel de joueurs « Noirs Génériques » au sein des Springboks entre 2014 et 2018

Parwine Patel

UMR 228 « Espace-Dev », Université de la Réunion
parwinepatel@hotmail.fr

Sylvain Cubizolles

UMR 228 « Espace-Dev », Université de la Réunion
sylvain.cubizolles@univ-reunion.fr

Jean-Michel Delaplace

UMR 228 « Espace-Dev », Université de la Réunion
jean-michel.delaplace@univ-reunion.fr