Avec ce numéro 8, les CROI maintiennent leur orientation interdisciplinaire et internationale. Consacré à des varia, il réunit six articles. Soulignons que les contributeurs sont, principalement, de jeunes chercheurs (Université de La Réunion ou de Stellenbosch) pour certains accompagnés de chercheurs confirmés.
Ainsi Sophien Horri, Thierry Malbert, Ségolène Meysonnier et Michel Spodenkiewicz ouvrent le numéro avec un article portant sur les pratiques thérapeutiques néo-traditionnelles d’un fundi (guérisseur traditionnel d’origine comorienne) en période de pandémie de covid-19. L’approche anthropologique est convoquée.
Mélodie Lherminez, François Taglioni et Christian Germanaz nous entraînent sur les chemins de pêcheurs de la côte occidentale de La Réunion. La question des usages est ainsi soulevée sur fond d’analyse de la maritimité des populations locales.
L’article de Thibaut Dubarry est consacré aux Tsotis, terme qui signifie « voyous » ou « gangsters » dans les townships sud-africains. Il explore le quotidien de ces groupes criminels dans les Cape Flats de Cape Town, la deuxième plus grande métropole d’Afrique du Sud. Ce faisant, il interroge le gangstérisme au sein des marginalités urbaines.
En outre, des chercheurs en droit et en économie de la zone (Université de La Réunion ou de Maurice) apportent leur contribution à ce huitième numéro.
Laurent Didier s’intéresse ainsi à la problématique de l’intégration commerciale des Petites économies insulaires en développement (PEID), en particulier de l’océan Indien, sous l’effet d’accords commerciaux préférentiels. À partir du modèle de gravité en commerce international et de données agrégées et désagrégées de flux commerciaux bilatéraux, portant sur des produits primaires, l’économiste évalue l’impact, sur la période 1962-2014, des accords commerciaux régionaux sur le commerce intra-zone de ces PEID. Il met en relief l’hétérogénéité des effets de tels accords selon la nature des relations concernées (Nord-Sud, Sud-Sud), le type d’accords en vigueur (non réciproques, réciproques) et les produits échangés (huile végétale, café et thé, sucre, fruits et légumes, produits de la pêche, etc.).
Hélène Pongérard-Payet analyse les grandes évolutions ainsi que les enjeux de la coopération territoriale européenne ou d’Interreg dans l’océan Indien des années 1990 à nos jours. Elle dévoile comment la politique de cohésion économique, sociale et territoriale de l’Union européenne permet aux régions ultrapériphériques de La Réunion et de Mayotte de tisser des liens avec les pays de leur environnement proche, en particulier les îles de l’Indianocéanie. À cette fin, les moyens financiers du Fonds européen de développement régional, l’évolution des cadres stratégiques et juridiques ainsi que les programmes Interreg V se déployant dans la zone sont passés en revue.
Dans un registre de civiliste, Goran Georgijevic s’efforce d’esquisser un régime juridique de l’amitié, à partir des règles éparpillées du Code civil mauricien et de la jurisprudence de la Cour suprême de Maurice, tout en s’appuyant sur le droit civil français, en sa qualité de persuasive authority en droit mauricien. Privilégiant la traditionnelle méthode analytique, il démontre que si l’amitié est source d’une certaine utilité financière pour l’un des amis, elle peut aussi se révéler contraignante, en donnant parfois lieu à un traitement moins favorable de la situation amicale, voire à l’exclusion de certaines protections légales.
Ce numéro témoigne également de la volonté d’ouvrir le champ éditorial de la revue avec la rubrique Entretien. Deux enseignants-chercheurs de l’Université de La Réunion, Fabrice Folio, MCF-HDR en Géographie et Guilhem Armand, MCF-HDR en Lettres, nous apportent un éclairage sur leur recherche. Ils ont en commun, outre le fait d’œuvrer à la faculté des Lettres et Sciences Humaines, d’avoir récemment soutenu leur HDR : le 19 avril 2022 pour le premier et le 8 décembre 2020 pour le second. Cet « entretien » est l’occasion pour eux de revenir sur les éléments marquants de leur carrière et sur leur posture de chercheur.
Enfin, ce numéro propose une recension, réalisée par Serge Bouchet, de l’ouvrage dirigé par Jean-Michel Jauze, Définis-moi « l’Indianocéanie ». Il s’agit d’actes de colloque tenu à l’Université de La Réunion en octobre 2018, riche de réflexions sur cette aire émergente, de plus en plus présente dans les discours et projets politiques, culturels et identitaires.